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Gaza : Obama a raté le coche...

vendredi 23 janvier 2009 - 07h:32

Robert Fisk - The Independent

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Il aurait été utile qu’Obama ait le courage de dire ce que tout le monde sait au Moyen-Orient. Non, il ne s’agit pas du retrait américain d’Irak. Tout se sait à ce sujet. Le début de la fin de Guantanamo et la probable nomination de George Mitchell comme envoyé spécial au Moyen-Orient n’étaient rien moins qu’attendus. Bien sûr, Obama a fait référence aux « innocents abattus », mais ce n’était pas tout à fait les « innocents abattus » que les Arabes avaient à l’esprit.

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"Peau noire, masque blanc ?" comme l’écrivait Frantz Fanon

Il y a eu hier le coup de fil à Mahmoud Abbas. Peut-être Obama imagine-t-il qu’Abbas est le dirigeant des Palestiniens, mais comme tous les pays arabes le savent, sauf peut-être M. Abbas, il est le chef d’un gouvernement fantôme, un quasi-cadavre maintenu en vie uniquement sous une transfusion d’aide internationale et par « un plein partenariat » qu’Obama lui a apparemment renouvelé, quel que soit la signification du mot « plein ». Et c’est sans surprise aucune qu’Obama a également passé le coup de fil obligé aux Israéliens.

Mais pour les peuples du Moyen-Orient, l’absence du mot « Gaza » — et aussi bien du mot « Israël » — a jeté une ombre sur le discours inaugural d’Obama. N’a-t-il fait attention à rien ? A-t-il eu peur ? Celui qui écrit les discours d’Obama n’a-t-il pas réalisé que parler des droits des Noirs — la raison pour laquelle l’homme noir qui était son père n’avait pu se faire servir dans un restaurant 60 ans plus tôt — aurait pour effet de concentrer les pensées des Arabes sur le sort d’un peuple qui a gagné son droit de vote il y a seulement trois ans, mais qui a ensuite été puni pour avoir voté pour les mauvais candidats ? Il n’était pas question d’un éléphant dans le magasin de porcelaine. Il était question de l’énorme quantité de cadavres entassés sur le plancher du magasin de porcelaine.

Bien sûr, il est facile d’être cynique. La rhétorique arabe a quelque chose en commun avec les clichés d’Obama : « le dur travail et l’honnêteté, le courage et la limpidité dans le comportement [fair-play] ... la loyauté et le patriotisme ». Mais quelle que soit la distance entre le nouveau président lui-même et le régime de vicieux qu’il a remplacé, le 11 septembre reste accroché comme un nuage sur New York. Nous devons nous souvenit « du courage des pompiers pour prendre d’assaut un escalier empli de fumée ». En effet, pour les Arabes, la formule « notre nation est en guerre contre un vaste réseau de violence et de haine » est du Bush à l’état pur ; la référence à la « terreur », un mot craint par Bush et les Israéliens, est le signe inquiétant que la nouvelle Maison-Blanche n’a pas encore capté le message.

Nous avons entendu Obama parler apparemment de groupes islamistes tels que les Talibans qui « abattent des innocents » mais qui « ne peuvent pas nous survivre ». Comme pour ceux qui dans le discours sont traités de corrompus et « font silencieusement dissidence » — ce qui visait probablement le gouvernement iranien — la plupart des Arabes vont appliquer ces termes au Président Hosni Mubarak d’Egypte (qui a bien entendu reçu également hier un coup de fil d’Obama), au roi Abdallah d’Arabie saoudite et à une foule d’autres autocrates et bourreaux réputés être les amis de l’Amérique au Moyen-Orient.

Hanan Ashrawi avait vu juste. Les changements au Moyen-Orient — la justice pour les Palestiniens, la sécurité pour les Palestiniens ainsi que pour les Israéliens, la fin de la construction illégale des colonies de peuplement pour les Juifs et les Juifs seulement sur la terre arabe, la fin de toute violence, et pas seulement la variété venant des pays arabes — devraient être « immédiats » avait-elle une fois dit. Mais si la nomination du gentil George Mitchell devait répondre à cette demande, le discours inaugural — une véritable note « B-moins » au Moyen-Orient — n’y a pas contribué.

Le message amical destiné aux musulmans, « une nouvelle voie à suivre, basée sur l’intérêt mutuel et le respect mutuel », n’a tout simplement pas fait la moindre référence aux images du bain de sang dans Gaza sang auquel le monde a assisté avec indignation. Oui, les Arabes et de nombreux autres pays musulmans comme la plus grande partie du monde, peuvent se réjouir que l’horrible Bush disparaisse. Il en va de même avec Guantanamo. Mais les tortionnaires sous les ordres de Bush et Rumsfeld vont-ils être punis ? Ou vont-ils être tranquillement promus à des postes où ils n’auront pas à utiliser de l’eau et des chiffons [pour les techniques d’étouffement - N.d.T], ni à écouter des hommeshurler ?

Bien sûr, donnons à l’homme sa chance. Peut-être George Mitchell parlera-t-il au Hamas — il est l’homme justement qui puisse le tenter — mais qu’est-ce que ces anciens ratés comme Denis Ross auront à dire, et Rahm Emanuel, et Robert Gates et Hillary Clinton ? Il s’agissait plus d’un sermon que du discours inaugural d’Obama, même les Palestiniens à Damas ont remarqué l’absence de ces deux mots : Palestine et Israël.

Ils étaient tellement à fleur de peau que même un jour de gel à Washington, Obama ne portait pas de gants.

Du même auteur :

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- Débâcle afghane
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- Illusions guerrières

22 janvier 2009 - The Independent - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.independent.co.uk/opinio...
Traduction de l’anglais : Nazim


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