Des lettres entre les balles - Premier festival de littérature en Palestine
jeudi 29 mai 2008 - 06h:09
Luis Núñez Villaveirán - El Mundo
La Palestine célèbre son premier festival de littérature avec une dizaine d’écrivains.
- L’acteur Khaled lit un texte d’Edward Saïd pendant le festival - Photo : El Mundo
Al-Qods [Jérusalem] - Il n’y a pas que des conflits. Ni morts, ni blessés. Ni haine. La culture s’ouvre un passage à travers le prisme, dont une des deux facettes est apparue il y a 60 ans.
On dit que la plume est plus forte que l’épée. En Palestine une plume joue contre l’artillerie lourde. Mais cela n’a pas empêché plusieurs fondations islamiques et occidentales de célébrer le premier festival palestinien de littérature.
« L’idée consistait à montrer à un groupe d’écrivains notre réalité, spécialement dans cette période si dure, la Nabka (la catastrophe) » dit Rania Elias, une des organisatrices de l’évènement. Pour ce faire, une dizaines d’écrivains sont venus en Palestine depuis l’Inde jusqu’au Royaume-Uni. Beaucoup d’entre eux connus au plan international tel Sir David Hare ou Pankaj Mishra se sont mêlés aux écrivains nationaux comme Suheir Hammad ou Mourid Barghouti.
Colloques, discussions, conférences, pièces de théâtre, débats et littérature. Un cocktail explosif qui a porté les écrivains de nombreuses villes et universités de la « terre promise ». Le Péruvien Daniel Alarcon n’avait pas de mots pour décrire son expérience. Des phrases comme « ils sont isolés » ou « tout ce qu’on peut faire est minime » lui échappaient de la voix saccadée de quelqu’un qui avait parcouru pendant 5 jours les territoires palestiniens.
La poétesse Suheir Hammad connaît bien ce sentiment. Ses parents sont réfugiés palestiniens et, bien qu’elle soit née à Amman, son coeur penche clairement pour la Palestine. « La Palestine s’est ouverte à ces écrivains, à eux maintenant de s’ouvrir à la Palestine. » dit- elle avec la même force que celle avec laquelle elle a lu un superbe texte en anglais et en arabe dans le dernier événement du festival.
Parce que ces 5 jours se sont achevés dans le Théâtre National Palestinien de Jérusalem. Il était plein à craquer. Les écrivains et un acteur qui ont lu leurs textes et d’autres textes reflétant des expériences de vie a représenté le moment fort de ces 5 jours. Ces 5 jours s’achevèrent par le mélange de deux arts précieux que sont la musique et la littérature.
D’autres artistes de premier plan et leurs instruments se joignirent à la fête. Ils étaient 4 au lieu de 6. « Leurs permis de séjour ont été annulés à cause de la visite de Bush » se lamentait Heather Bursheh, la flutiste de Yasmeen, un groupe appartenant au conservatoire national Edward Saïd. « Nous avons pensé abandonner mais je suis contente de l’avoir fait » ajoute t-elle.
Lorsque la flûte, les percussions, la contrebasse et le violon se sont tus, la littérature s’est mise à chanter. Le do mineur donnait le pas aux textes de James Joyce, de Dickens ou aussi à une lettre du médecin Michaël Mahalouf écrite à Beyrouth en pleine guerre après la création de l’état israélien. A la fin, les remerciements ne manquèrent pas ; à une amie, aux Palestiniens, « vous m’avez donné plus que je ne pourrai jamais vous rendre » concluait un des membres de l’auto-baptisée « bande de la vérité ».
Edward Saïd disait lui-même qu’il fallait réaffirmer le pouvoir de la culture sur la culture du pouvoir. Si c’était possible, le souhait de Rania Elias pourrait peut être se réaliser : célébrer le second festival palestinien de littérature aussi dans la bande de Gaza. Tout dépend du pouvoir de la plume face aux armes et à la haine.
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26 mai 2008 - El Mundo - Vous pouvez consulter cet article à :
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Traduction de l’espagnol : Charlotte