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Un journal à Gaza : la Nekba et moi

dimanche 20 avril 2008 - 08h:28

Najwa Sheikh

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En tant que Palestinienne de la troisième génération, je vis différemment la douleur et la souffrance de la Nekba

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Dans quelques semaines, les Palestiniens du monde entier commémoreront leur Nekba (catastrophe), la perte de leur patrie, de leur identité, de leur dignité et de leur vie.

Beaucoup de pays et d’organisations qui s’intéressent au dilemme palestinien participeront à cette commémoration. Pour eux, commémorer la Nekba consiste à parler des souffrances et de la perte d’une nation, de raconter les histoires de ceux qui ont vécu l’événement et qui ont fui leur patrie animés d’un seul espoir : celui de rentrer un jour.

En tant que Palestinienne de la troisième génération, je vis différemment la douleur et la souffrance de la Nekba. Je me rends très bien compte de la terrible perte que mes grands-parents et mes parents ont subie quand ils ont fui leur patrie en 1948.

Je sais qu’il est terrible de perdre le lieu qui vous donne un sentiment de sécurité ainsi qu’une identité qui vous dit qui vous êtes vraiment. Mon coeur se brise devant la douleur que les grands-parents ont éprouvée pendant les années de leur vie dans le camp jusqu’à leur mort, animés du seul désir de revoir leur maison. Tout aussi tristes sont les rêves que mon père a hérités de ses parents et ses propres rêves de rentrer à la maison.

Mais pour moi, la Nebka est plus que la fuite hors de la patrie et la perte d’identité. La Nekba est ne pas avoir un seul souvenir de la patrie qui appartenait à mes grands-parents et à mes parents. C’est n’avoir rien à raconter à mes enfants, comme le goût des fruits de ma terre, l’odeur du sable, les histoires et les expériences vécues avec mon peuple.

Mes grands-parents et leur génération, mes parents et leur génération aussi ont de la chance, simplement parce que chacun d’eux a encore une histoire à raconter, sa propre histoire, même l’histoire de la fuite avec toutes les expériences pénibles qui l’ont accompagnée. Le souvenir commun de l’endroit qui leur appartenait un jour les aide à continuer à vire et leur a donné le courage de lutter contre les conditions difficiles de leur existence.

Je me souviens encore des histoires de mes grands-parents sur leur patrie, leurs traditions, leurs voisins, les mariages, les naissances et même la mort. A chaque mot leur revenait une foule de sensations qui rompent la douleur et le sentiment de perte et ramène leur patrie, fraîche et vivante, comme s’ils ne l’avaient jamais quittée.

Ces histoires étaient l’étincelle d’espoir qui renforçait leur conviction et qui leur donnera, et leur donne, une raison de vivre, de continuer. Raconter ces histoires à leurs enfants et à leurs petits-enfants faisait revivre leur patrie.

Je suis une réfugiée et j’ai vécu toute ma vie dans un camp, me demandant quelles histoires je raconterai à mes enfants, quelles histoires garder. Mes histoires se limitent au camp, aux ruelles étroites, aux égouts qui débordent en hiver, aux classes surpeuplées.

Mes histoires n’ont pas de verger dont je peux décrire les fruits et le goût. Dans mes histoires, il n’y a pas de scènes dans la nature et des gens simples qui vivent leur vie.
Ces histoires, mes enfants ne les vivront jamais, parce que eux aussi vivront la même vie que leurs parents : la vie du camp. Ils parcourront les mêmes ruelles étroites, ils sauteront au-dessus des mêmes égouts et ils connaîtront la même vie pénible et entassée que celle que leurs parents ont vécue.

Pour mes parents et mes grands-parents, la fuite a été une expérience terrible, mais leurs souvenirs atténuent l’amertume de leur perte et leur douleur. Les souvenirs les aident quand ils se perdent dans leur tristesse et ramènent une douceur dans leur vie. Ce privilège, je ne l’aurai pas, ni moi, ni mes petits-enfants.

Najwa Sheikhest une réfugiée palestinienne de al-Majdal situé au nord de la Bande de Gaza. Elle a vécu dans des camps de réfugiés à Gaza toute sa vie. Elle est mariée et a trois enfants. Elle a écrit cet article pour PalestineChronicle.com

L’original de cet article peut être consulté ici :http://palestinechronicle.com/view_...
Traduction : amg


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