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En prison, qui sait pourquoi ?

samedi 22 mars 2008 - 06h:41

Mohammed Omer - IPS

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On aurait imaginé que le bébé nommé Youssef avait toute la vie devant lui, mais qui sait, pour un enfant né de parents palestiniens à Gaza. De plus, Youssef est né dans une prison israélienne.

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Ramallah : rassemblement de soutien aux prisonniers palestiniens dans les geôles israéliennes - Photo : Ma’anImages

Il est le seul des neuf enfants de Fatima al-Zeq qui soit avec elle pour cette raison : elle a été arrêtée il y a neuf mois. Mais aujourd’hui l’enfant n’est plus avec elle. Il a été pris de douleurs intestinales, il a commencé à vomir et il a été transféré à l’hôpital de la prison d’Hasharon en Israël.

Fatima a écrit à plusieurs associations humanitaires à Gaza pour demander de l’aide afin de savoir si son bébé est bien traité, car elle ne peut le faire elle-même.

Ses autres enfants ne savent pourquoi leur mère est en prison ; les Israéliens ne leur ont rien dit, pas plus qu’aux autorités palestiniennes. Ils ont également décliné de nous répondre. Tout au plus, les Israéliens disent que les arrestations sont faites pour des « raisons de sécurité ».

Selon une source palestinienne, elle aurait été arrêtée parce que les autorités israéliennes la suspectaient de vouloir mener une attaque en Israël. Aucun explosif n’a été trouvé sur elle. Une autre source suggère qu’elle a été arrêtée parce qu’elle est de la famille d’un chef du Djihad Islamique.

Fatima était allée dans un hôpital israélien pour se faire soignée et avait l’autorisation nécessaire pour le faire ont indiqué les membres de sa famille. Mais elle a été arrêtée au point de contrôle et jetée en prison. Elle rejoint des milliers de Palestiniens dans les prisons israéliennes. Leurs familles ne sont pas toujours informées de la raison de ces incarcérations, ou du fait qu’ils soient mis en examen ou non, condamnés ou non et de la date éventuelle de leur libération.

Juamana Abu Jazar, 7 ans, en connaît un rayon à ce sujet. « Ma mère est morte et je n’ais ni frère ni s ?ur », dit-elle en regardant un cadre accroché à un clou rouillé dans sa maison de Gaza. « Mon père est en prison en Israël, il vit dans une cellule sombre et je ne l’ai vu qu’une seule fois ».

Jumana vit avec sa grand-mère Umm Ala’a dans le camp de réfugiés de Rafah au sud de la bande de Gaza. Umm Ala’a dit que le père de Jumana a « été arrêté par les forces d’occupation israéliennes en 2001 alors
qu’il revenait par la frontière de Rafah. Il était accompagné de son père qui avait reçu des soins médicaux à l’étranger. Un juge israélien l’a condamné à 18 ans de prison ».

Encore une fois, la famille dit qu’elle n’a aucune idée du délit qu’il aurait commis. Mais une chose est claire, lui et de nombreux autres arrêtés, ne sont pas ceux qui sont punis pour avoir lancé des bombes sur Israël, pas plus que pour avoir mené à bien des attaques terroristes contre Israël. Ils sont coupables d’être membres de groupes politiques - en tout cas c’est que leurs familles croient.

« Son crime, c’est d’être palestinien » indique Umm Ala’a. « C’est un impôt sur la vie que nous payons tous ».

De nombreux Palestiniens sont condamnés pour des chefs d’inculpation qui ne sont jamais rendus public, mais nombreux sont ceux, dans les prisons israéliennes, qui n’ont jamais été mis en examen (inculpés ?)

Ahmad Abu Haniyah, coordinateur des jeunes pour le centre de l’information alternative, un projet vieux de 20 ans mis en place conjointement par des journalistes Israéliens et les Palestiniens, a été arrêté par les Israéliens en mai 2005. Il a été libéré en mai l’année dernière. Les Israéliens ne lui ont jamais dit pourquoi il avait été arrêté. Il n’a jamais été inculpé ni jugé ; les Israéliens appellent cela la détention administrative.

Aujourd’hui chaque famille palestinienne connaît un membre de sa famille ou un ami qui a été incarcéré de cette manière.

Israël libère, de temps à autre, un lot de prisonniers à titre de « bonne volonté ». Ceci fonctionne bien au niveau international, mais en général il s’agit de gens qui sont, de toutes façons, proches de leur date de libération. Ce geste ne profite qu’à très peu de Palestiniens et ne trompe personne.

Atia Abu Mussa a été incarcéré dans la prison du désert de Nafha depuis 14 ans, il a été arrêté à l’âge de 21 ans. Tous les lundis, ses amis et sa famille d’Atia, ainsi que d’autres, se rassemblent devant le bureau de la Croix Rouge Internationale à Gaza afin de soutenir leurs proches.

« Mon fils est en grève de la faim depuis une semaine » déclare Ramdan al-Baba devant le bureau de la Croix-Rouge. « Il a travaillé comme garde du corps de l’ancien président Yasser Arafat à Ramallah en 2003. Son crime est d’avoir occupé ce poste ». Les conditions dans les prisons israéliennes sont difficiles, dit-il. « Je ne peux même pas lui envoyer une lettre ».

Les Palestiniens se retrouvent dans l’incapacité de faire jouer leur droit en habeas corpus, un droit protégé par la Convention de Genève selon laquelle un état doit fournir des informations sur la localisation d’un individu - ou de son corps - dans sa juridiction. Israël rejette cette clause en invoquant le fait qu’il n’est pas nécessaire pour des personnes « en détention administrative ». Pour le moment, 863 Palestiniens sont en prison depuis plus de 15 ans dans ce cadre selon les chiffres officiels palestiniens.

Il y a en tout 10400 prisonniers palestiniens dans les prisons israéliennes. Ce chiffre inclut 90 femmes et 328 enfants de moins de 18 ans, selon le ministère palestinien pour les détenus et anciens détenus. Quarante-six d’entre eux sont des membres du Parlement, pour la plupart affiliés au Hamas.

Les associations des droits de l’homme israéliennes indiquent que les forces du « Shin Bet » torture régulièrement les Palestiniens dans les prisons israéliennes. Les deux groupes B’Tselem et HaMoked : centre pour la défense des personnes a suivi 73 prisonniers entre juillet 2005 et juillet 2006. Leur rapport indique que le Shin Bet utilise de façon régulière les « passages à tabac, les ligatures douloureuses, les torsions dorsales, l’élongation du corps ainsi que la privation de sommeil » pour torturer les prisonniers palestiniens.

19 mars 2008 - Inter Press Service - http://www.ipsnews.net/news.asp?idnews=41647
Traduction de l’anglais : Sandrine Ageorges


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