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La conférence d’Annapolis sur le Proche-Orient est encore en jachère

jeudi 18 octobre 2007 - 07h:05

Luis Lema - Le Temps

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La secrétaire d’Etat américaine Condoleezza Rice effectue sa septième tournée cette année.

Condoleezza Rice a la mémoire courte. A moins que ce ne soit de l’amnésie volontaire. A Ramallah, lundi, elle décrivait l’initiative diplomatique lancée par les Américains au Proche-Orient comme « l’effort le plus sérieux pour achever ce conflit depuis beaucoup, beaucoup d’années ». En fait, « l’effort » précédent date d’il y a sept ans. Et à cette époque, alors que la présidence de Bill Clinton touchait à sa fin, l’échec des négociations de Camp David avait débouché sur la période la plus meurtrière qu’ait jamais connue la région.

Mauvaises ondes

Entre-temps, les Etats-Unis se sont détournés de la question. Puis ils y sont revenus en force : c’est la septième tournée au Proche-Orient de la secrétaire d’Etat depuis le début de l’année. Même si l’on s’abstient de l’évoquer publiquement, le fiasco de Camp David est dans toutes les mémoires. A tel point que, pour ne pas le répéter, on refuse même de prononcer le mot « sommet ». C’est une simple « rencontre » que les Américains tentent aujourd’hui de mettre sur pied.

Le lieu de cette « rencontre » entre Israéliens et Palestiniens est fixé : ce sera à Annapolis, dans le Maryland, préféré à la résidence de Camp David pour éviter toute présence d’ondes négatives. Mais la date, elle, n’est pas encore arrêtée, tant les divisions restent vives : on évoque à présent le 26 novembre, mais la conférence pourrait tout aussi bien être renvoyée en décembre. Surtout, la rencontre n’a pas pour l’instant de contenu clair. Les Israéliens veulent se contenter de la signature d’un document aussi vague que possible, visant à remettre sur les rails « le processus de paix ». Mais les Palestiniens ont d’ores et déjà menacé de boycotter la conférence si les questions de fond n’étaient pas abordées (Jérusalem, les frontières, les réfugiés...), et si un calendrier précis n’accompagnait pas le document.

Pour le gouvernement de George Bush, le moment est venu. Comme le déclarait de manière un peu candide Condoleezza Rice : « Franchement, il est temps d’établir un Etat palestinien. » Washington veut croire que le dossier israélo-palestinien a perdu son caractère incandescent. Davantage préoccupés par l’avenir de l’Irak et par le rôle accru de l’Iran dans la région, les Etats arabes se montreraient désormais moins farouches envers Israël. Mardi, « Condi » Rice arrachait d’ailleurs, du bout des lèvres, une participation de l’Egypte à la conférence d’Annapolis malgré les fortes réticences que montrait jusqu’ici Le Caire de manière répétée.

Mais cela suffira-t-il ? La Syrie ne veut pas entendre parler d’une telle réunion si ses propres intérêts (la récupération du plateau du Golan) ne sont pas pris en compte. Et aux Etats-Unis mêmes, certains s’alarment devant le risque de « conséquences dévastatrices » qu’entraînerait une conférence mal préparée.

Inclure le Hamas

Dans une lettre adressée au président Bush, quelques « poids lourds » de la diplomatie américaine - Zbigniew Brzezinski, Brent Scowcroft, Paul Volcker, Lee Hamilton - mettent en garde : la conférence du Maryland, disent-ils, doit « dessiner les contours précis d’une paix permanente » avec un calendrier et un dispositif international visant à le faire respecter. Faute de quoi, les résultats seront catastrophiques.

De même, ces responsables insistent sur la nécessité d’inclure le Hamas dans le processus et de ne pas s’en tenir au Fatah du président palestinien Mahmoud Abbas. Proclamée « entité hostile », Gaza est en effet laissée hors du jeu par le gouvernement israélien, tout comme par les Etats-Unis. Or, de l’avis de ces experts, ne pas s’assurer de la collaboration du Hamas serait la meilleure manière de voir resurgir la violence et de détruire ainsi le château de cartes qu’est en train d’assembler la secrétaire d’Etat américaine.

Cette analyse rejoint celle que font, en privé, les responsables européens. « Une conférence qui n’intégrera pas le Hamas est condamnée à l’échec », expliquait l’un d’eux de passage à New York, en insistant sur la « fragilité dramatique » dans laquelle sont placés tous les acteurs de cette pièce : le Palestinien Mahmoud Abbas, qui ne contrôle que la Cisjordanie, mais aussi l’Israélien Ehoud Olmert, menacé par des départs dans sa propre coalition. Sans même parler de George Bush, ce lame duck (canard boiteux) sur le départ.

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Luis Lema, New York - Le Temps, le 17 octobre 2007


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