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Boycott : cibler Israël

vendredi 17 août 2007 - 06h:42

George Bisharat - AMIN

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Quand un boycott citoyen contre un état devient-il moralement justifié ?

Cette question est soulevée par un mouvement croissant en faveur du boycott d’Israël au niveau universitaire, culturel et économique.

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Kidnapping de résistants palestiniens par l’armée israélienne d’occupation
Naplouse, 14 août 2007 - Photo : AP

Le mouvement comprend des églises, des syndicats, des sociétés professionnelles et d’autres organisations basées aux Etats-Unis, au Canada, en Europe et en Afrique du Sud. Il a provoqué des réactions outrées de la part des défenseurs d’Israël.

Les dirigeants syndicaux des États-Unis ont condamné les syndicats britanniques, lequels représentent des millions de salariés, pour avoir soutenu le boycott à l’encontre d’Israël. Des universitaires américains avaient de façon recueilli des signatures contre le boycott, puis ont organisé une campagne publicitaire dans les journaux américains - informant involontairement un très large public de l’existence de cette controverse.

Les défenseurs d’Israël ont protesté en disant qu’Israêl n’était pas le pire contrevenant des droits de l’homme dans le monde, et que de mettre ce pays en avant était de l’hypocrisie, voir même de l’anti-sémitisme. De façon rhétorique, ceci déplace la question du respect des droits de l’homme par Israël vers la question des raisons cachées de ses critiques.

Mais « le pire en premier » n’a jamais été la règle pour décider qui boycotter. Si cela avait été la cas, le régime de Pol Pot, et non pas le régime ségrégationniste d’Afrique du Sud, aurait été pris pour cible dans le passé. Ce boycott n’a pas eu lieu - les liens du Cambodge avec l’occident étaient insuffisants pour rendre n’importe quel embargo efficace. Le boycott aujourd’hui de la Corée du Nord serait de la même façon futile. La conséquence devrait-elle que toute autre recherche pour la justice soit mise en veilleuse ?

En revanche, le boycott de l’Afrique du Sud a eu de l’effet. L’opprobre dont ont souffert les Africains du sud blancs les a incontestablement aidés à se persuader de céder aux justes demandes de la majorité noire. Israël, aussi, est soucieux avec assiduité de son image publique. Un réseau dense de relations économiques et culturelles l’attache également à l’occident. Ses violations des droits de l’homme, sans contestation possible et documentées, le rendent mûr pour le boycott.

Quelles actions d’un état devraient déclencher un boycott ?

L’expulsion ou l’intimidation pour déclencher la fuite de la majorité de la population d’un pays, puis ensuite nier un droit de retour universellement reconnu ? Israël a fait cela.

Se saisir, sans compensation, des propriétés de centaines de milliers de réfugiés ? Israël a fait cela.

Torturer systématiquement les prisonniers, beaucoup étant même emprisonnés sans jugement ? Israël a fait cela.

Assassiner ses adversaires, y compris ceux vivant dans les territoires qu’il occupe ? Israël a fait cela.

Démolir des milliers de maisons appartenant à un groupe national, et installer ses propres ressortissants surla terre appartennat à une autre nation ? Israël a fait cela.

Aucun pays disposant d’un tel bilan, qu’il soit le premier ou le cinquantième dans la liste, ne peut raisonnablement protester contre un boycott.

La ségrégation en Afrique du Sud a produit une autre norme utile. Comment le comportement israélien à l’égard des Palestiniens peut-il être comparé au traitement subis par les Noirs dans l’ancienne Afrique du Sud ? Il est semblable ou même pire, estiment un certain nombre d’Africains du sud dont l’archevêque Desmond Tutu, John Dugard qui est rapporteur spécial des Nations Unies dans les territoires occupés, des membres du Congrès National et le ministre Ronnie Kasrils.

Ce dernier observait récemment que l’Afrique du Sud ségrégationniste n’avait jamais utilisé de jets pour attaquer les combattants de l’ANC [African National Congress], et que la violence du contrôle israélien sur les Palestiniens était « 10 fois pire. »

La dualité des lois pour les colons juifs et les Palestiniens, les routes et les zones d’habitation séparées, ainsi que les restrictions à la libre circulation des Palestiniens rappellent fortement l’ancienne ségrégation en Afrique du Sud.

Si le boycott du système ségrégationniste sud-africain était approprié, il est alors aussi justifié d’appliquer cette méthode à Israël au même niveau.

Israël a eu un traitement à part mais pas d’une façon dont ses défenseurs se plaignent. Bien au contraire, Israël a été enveloppé dans un cocon d’impunité. Notre gouvernement a opposé son veto à 41 résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies qui condamnaient les actions israéliennes - cela correspond à la moitié des vetos appliqués par les Etats-Unis depuis la naissance des Nations Unies - de ce fait permettant la poursuite des abus israéliens.

L’administration Bush a annoncé une augmentation de l’aide militaire à Israël de 30 milliards de dollars pour la prochaine décennie.

D’autres occupations militaires et viols des droits humains ont fait face à un traitement beaucoup plus rigoureux. Rappelons juste l’invasion du Koweit par l’Irak en 1990. Les Nations Unies auraient peut-être depuis longtemps dû poser à Israël le même ultimatum que celui donné à l’Irak - et l’avoir imposé. L’occupation par Israël de terres arabes a maintenant excédé 40 ans.

L’Iran, le Soudan et la Syrie ont tous été visés par des sanctions fédérales et au niveau de l’état. Même la ville de Beverly Hills étudie des actions de désinvestissement concernant l’Iran, suivant l’exemple de Los Angeles qui a approuvé une législation de désinvestissement d’Iran en juin. Pourtant la République Islamique d’Iran n’a jamais attaqué ses voisins ni occupé leurs territoires. On la suspecte seulement de vouloir disposer des mêmes armes nucléaires que celles dont Israël dispose déjà.

Les politiciens du monde entier, et les américains en particulier, ont failli. Nos chefs, de la branche exécutive jusqu’au congrès, ont tergiversé ou encouragé Israël alors qu’il dévorait la terre devant être à la base d’un état palestinien. Leur irresponsabilité collective condamne les Palestiniens et les Israéliens à un futur fait d’affrontements et d’insécurité et mine notre position au niveau mondial.

Si les politiciens ne peuvent pas résoudre cette question, alors les citoyens le doivent. C’est pourquoi le boycott d’Israël est devenu nécessaire et justifié.


* George Bisharat est un professeur de droit à l’université de Hastings à San Francisco, et écrit fréquemment sur le droit et la politique dans le Moyen-Orient .


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George Bisharat

Du même auteur :

- Le mirage de la solution à deux Etats

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- A propos du boycott universitaire d’Israël
- Il faut sanctionner Israël, désinvestir d’Israël

15 août 2007 - - AMIN (Arab Media Internet Network) - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.amin.org/look/amin/en.tp...
Traduction : Claude Zurbach


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