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L’environnement sacrifié

dimanche 11 décembre 2005 - 21h:48

Marie-Jo

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Nous passons par une vallée où chemine un énorme tuyau rouillé, fendu en plusieurs endroits. Une substance mousseuse s’échappe des déchirures et témoigne de la nature de ces conduites elles viennent de la colonie d’El Kana, installée sur les terres des villages de Mash’a et d’Az Zawiya et en évacuent les eaux usées. Quelques dizaines de mètres plus loin, un bruissement d’eau qui coule confirme nos craintes : la vallée est devenue un terrain d’épandage. Quelques branchages camouflent la sortie d’eau mais les odeurs ne permettent aucun doute.

Le phénomène est général.

A Wadi Qana, quelques kilomètres plus à l’est, une vallée superbe a été transformée en égout du fait des déjections de toutes les colonies qui l’entourent et notamment de celle d’Immanuel, très peuplée. Les Israéliens avaient démarré les travaux pour l’installation d’une station d’épuration mais ne les ont jamais terminés et tout s’écoule dans la vallée, détruisant la végétation et souillant l’eau en surface mais aussi la nappe phréatique, à n’en pas douter.

La colonie d’Ariel a 25 000 habitants et a été construite dans les années 70. Située sur une haute colline, elle surplombe, au Nord, le village de Marda. Des canalisations d’évacuation des eaux usées peuvent être découvertes lorsqu’on accède aux oliviers longeant la clôture métallique qui entoure la ville. Mais, à Marda, il y a aussi la décharge à ciel ouvert, béante, dévalant le dénivelé. Depuis le village, c’est un des premiers éléments qui saute aux yeux, aux pieds d’immeubles d’une dizaine d’étages,
particulièrement agressifs dans cet environnement rural.

Salfit est la ville principale de ce district, au Nord Ouest de Ramallah. Elle est à 5 km au Sud d’Ariel. Construite sur une colline, une vallée verdoyante s’étale à ses pieds. Mais, tout a changé depuis l’installation des Israéliens. Le petit ruisseau, qui coule à fond de vallée, avait transformé ce lieu en parc de loisirs pour les habitants. Il charrie, maintenant, toutes sortes d’immondices et ses eaux sont grises et nauséabondes.

La ville, par ailleurs, avait acheté un terrain et obtenu un financement de l’Allemagne pour organiser sa station d’épuration. Le matériel était sur place lorsque l’armée informa la Municipalité que l’emplacement ne convenait pas et le matériel fut confisqué. Ceci remonte à 10 ans. La ville a dû faire un emprunt pour l’achat d’un autre espace, situé à quelques centaines de mètres plus loin. Mais le projet est à nouveau bloqué car le « Mur » arrive, il va couper la vallée en 2 et la station serait du mauvais côté !

La Palestine et la gestion des déchets ! Tout semble coopérer pour aboutir à la situation actuelle. La guerre, les communications impossibles, le manque de moyens, l’absence de sensibilisation des populations... Le tableau est catastrophique.

Partout, ce ne sont que détritus : dans les villages, envahis par les plastiques en tout genre, un vieux réfrigérateur par ci, une carcasse de voiture par là, le long des routes aussi, au milieu des plus beaux paysages.

Marda, là aussi, est représentatif de l’ensemble. Les vestiges d’un village ancien sont perceptibles sous la forme de quelques beaux murs à moitié effondrés, quelques tombes joliment gravées. Il paraît que le village est vieux de 700 ans et qu’il a eu jusqu’à 7 mosquées. C’est pourquoi revenir du haut de la colline jusqu’au village est éprouvant. On passe par le cimetière transformé en décharge sauvage. Un responsable local nous explique qu’ils avaient une déchetterie mais qu’elle a été fermée par l’armée.

Certes, on peut vivre au milieu de tout cela. Après tout, cette pollution tue moins vite qu’une balle ! Mais cette vision de la Palestine actuelle complète bien le tableau de ce pays en immense souffrance. On se prend à rêver qu’un jour, la paix enfin là, les Palestiniens pourront régénérer cette terre qu’ils aiment tant et lui redonner toute sa splendeur.

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Voir aussi sur ce thème l’article de Al Jazeera du 5 avril 2005 : Israël va vider ses ordures en Cisjordanie

Hares, 10 novembre 2004


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