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Irak : courage, fuyons !

mardi 17 juillet 2007 - 06h:32

Editorial du New York Times

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Après s’être excusé, il y a deux ans, pour sa couverture trop "suiviste" de la guerre d’Irak, le New York Times appelle clairement au retour des troupes américaines et donne même le mode d’emploi. Extraits.

L’heure est venue pour les Etats-Unis de quitter l’Irak, sans autre délai que le temps nécessaire au Pentagone pour organiser un départ en bon ordre. Aussi terrifiant que cela puisse paraître, le président Bush souhaite garder le cap tant qu’il sera aux commandes, pour mieux refiler le bébé à son successeur. Quelle qu’ait pu être la cause que Bush défendait en Irak, elle est perdue.

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(AFP)

Retrait, mode d’emploi

Les Etats-Unis disposent de 160 000 hommes environ et de millions de tonnes d’équipement militaire en Irak. Le retrait de ces forces en toute sécurité est une formidable gageure. Le principal axe routier qui mène vers le sud et le Koweït est vulnérable aux attentats à la bombe. Il faudra donc déployer des soldats, des armes et des véhicules pour sécuriser les bases pendant la durée des opérations de rembarquement par air et par mer. Les Etats-Unis devraient également envisager d’utiliser le territoire kurde, dans le nord de l’Irak, comme zone de rassemblement protégée.

La guerre contre le terrorisme

En dépit des affirmations répétées du président Bush, Al-Qaida ne disposait d’aucune implantation en Irak avant l’invasion. C’est cette dernière qui lui a permis d’installer de nouveaux camps et qui lui a conféré un prestige renouvelé. Cette guerre a siphonné des ressources dont le Pentagone aurait eu besoin en Afghanistan, où l’armée était vraiment en mesure de traquer les chefs d’Al-Qaida. L’opération en Irak a par ailleurs creusé un fossé entre Washington, et certains de ses alliés essentiels dans la guerre contre le terrorisme, elle a rogné sur la force et la préparation au combat des troupes américaines. Enfin, cette invasion a créé un nouveau front sur lequel les Etats-Unis devront continuer de combattre les forces terroristes tout en s’assurant du soutien d’alliés locaux qui rejettent l’idée d’un Irak aux mains des terroristes internationaux. Dans un avenir prévisible, il faudra à l’armée des bases et des ressources pour panser cette blessure, qui tient de l’automutilation.

Des bases au Kurdistan

Les Etats-Unis pourraient s’entendre avec les Kurdes sur la création de bases dans le nord-est de l’Irak. Ou encore, le Pentagone pourrait se servir des installations dont il dispose au Koweït et au Qatar, ainsi que de son imposante présence navale dans le golfe Persique, comme autant de points de rassemblements. Si on laissait des unités en Irak, on risquerait trop facilement de se retrouver pris dans la guerre civile, tout en confirmant les soupçons de ceux qui affirment que le véritable objectif de Washington est d’installer des bases permanentes en Irak.

La guerre civile

Quand il s’oppose au projet d’un retrait des troupes américaines d’Irak, Bush assure qu’il entraînerait une guerre civile. Or la guerre civile fait déjà rage. L’Irak risque de se disloquer en plusieurs républiques distinctes, kurde, sunnite et chiite. Ce ne sont pas les troupes américaines qui empêcheront une telle évolution. Or, il est possible qu’en annonçant une date ferme pour un retrait, on contraigne enfin les responsables politiques irakiens et les gouvernements voisins à se concentrer sur la réalité. Dans l’idéal, cela pourrait pousser la classe politique irakienne à prendre des mesures en faveur d’une réconciliation nationale. Une chose est sûre, l’armée américaine ne peut pas résoudre ce problème. Le Congrès et la Maison-Blanche doivent prendre la tête d’un effort international pour aboutir à une solution négociée. Pour commencer, Washington doit en appeler aux Nations unies, celles-là même que Bush a ignorées et tournées en ridicule avant la guerre.

La crise des réfugiés

On recense déjà près de 2 millions de réfugiés irakiens, essentiellement en Syrie et en Jordanie, et au moins 2 millions de déplacés à l’intérieur du pays. Sans la coopération active des six Etats limitrophes - la Turquie, l’Iran, le Koweït, l’Arabie Saoudite, la Jordanie et la Syrie -, ce désastre risque d’empirer. Un afflux massif de réfugiés pourrait provoquer un débordement du conflit au-delà des frontières de l’Irak. Les Etats-Unis devraient lancer une campagne internationale, peut-être réunir une conférence de bailleurs de fonds afin de collecter des moyens financiers pour endiguer cette crise.

Voisinage

L’une des tâches les plus complexes [après le retrait] consistera à empêcher que les voisins de l’Irak ne se mêlent trop ouvertement de la situation. Tout comme l’Iran devrait faire l’objet de pressions de la communauté internationale afin qu’il laisse les chiites du sud de l’Irak décider de leur propre avenir, Washington doit contribuer à convaincre les puissances sunnites comme la Syrie de ne pas intervenir au nom des sunnites irakiens. Quant à la Turquie, elle doit s’abstenir de déployer des troupes dans les territoires kurdes. Mais pour cela, Bush doit cesser de refuser le dialogue avec Téhéran et Damas.

Bush et Dick Cheney ont eu recours à la démagogie et à l’intimidation pour faire taire les Américains qui réclamaient la fin de cette guerre. Ils disent que le retrait déclenchera un bain de sang, qu’il ouvrira la voie au chaos et encouragera les terroristes. Or tout cela a déjà eu lieu. Notre pays est aujourd’hui confronté à un choix. Soit nous permettons à Bush de laisser cette guerre traîner en longueur sans but précis, soit nous exigeons un retrait des forces américaines aussi rapide et aussi sûr que nous pouvons le garantir, tout en faisant notre possible pour empêcher le chaos de s’étendre.

Editorial du New York Times, via Le Courrier international, le 8 juillet 2007 : The Road Home


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