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Les habitants du Liban nord, en colère, ne veulent pas du retour des réfugiés

samedi 23 juin 2007 - 16h:17

Ya Libnan.com

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Tripoli - Après des décennies de coexistence pacifique, la mort de douzaines de soldats libanais (certains ont eu la gorge tranchée le 20 mai par les terroristes du Fatah al-Islam) a sonné le glas des relations amicales de voisinage avec le camp.

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Des soldats de l’armée libanaise et des habitants regardent la fumée monter du camp de réfugiés de Nahr al-Bared.

« Cela ne pourra plus jamais être comme avant après ce qu’ils ont fait et permis de faire » dit le fermier de 56 ans, Ali Baker à Al-Minieh, Tripoli au nord Liban près de la frontière syrienne.

Sirotant son café à la cardamone avec des voisins sous la vigne grimpante familiale, Baker a été interrompu par le bruit des mitrailleuses que l’armée a installées sur une colline toute proche. Il a attendu que les rafales s’arrêtent.

« Personne ici n’oubliera ni ne pardonnera » dit-il. Les autres ont acquiescé. « Chaque village dans cette région a perdu au moins un soldat ».

Mais, que se passera-t-il avec les réfugiés palestiniens qui ont fui le camp ?

« Nous ne voulons pas qu’ils reviennent - jamais » répond-t-il.

Son fils Mohammed (30 ans) montre l’aileron d’un mortier de petit calibre.

« Ceci est tombé derrière notre maison » dit-il. « Vous trouvez ça normal ? Vous appelez cela un acte de bon voisinage ? »

Dans un café près de l’entrée nord de Nahr al-Bared, le chanteur traditionnel Abdullah Khwailed est une figure populaire connue dans toute la région. Mais il est en colère. Très en colère.

« Je connais un soldat dont la mère est palestinienne » dit-il. « Il ne lui parle plus. Il y a maintenant de la haine entre nous, un gouffre qui ne peut plus être comblé. »

L’engagement du gouvernement libanais il y a plus d’un mois d’aider à reconstruire le camp de réfugiés, aujourd’hui une désolation faite de poutres et de plaques de béton brisés, n’a ici aucune répercussion.

« Ces assassins et ceux qui leur ont permis d’être là doivent être virés » enrage Khwailed ; « Qu’on rase le camp et qu’ils partent en Arabie Saoudite, en Jordanie ou en enfer ».

Son oncle affublé d’une grande moustache blanche, d’une calotte islamique et d’un large sourire édenté, a dit qu’il connaissait le propriétaire de la terre sur laquelle les frontières originales de 1948 du camp se sont étendues illégalement.

« Et pourtant il a laissé faire. Mais s’ils veulent reconstruire ces bâtiments, il m’a dit qu’il ferait appel à la police et aux tribunaux. Ils ne pourront pas reconstruire » dit-il.

Au crépuscule, les familles se rassemblent sur des chaises en plastique, fument des narghilés et ont une bonne vue des explosions provoquées par les obus qui explosent dans Nahr al-Bared. Ils sont rejoints par Mohammed Sahramen (53 ans) qui arrive avec quelques amis d’un village de montagne de l’Est.

« Je livrais chaque jour du lait et du fromage dans le camp » dit-il. « Je faisais de bonnes affaires et certains d’entre eux étaient des amis. Mais s’ils reviennent, je n’y mettrai plus les pieds. Je vais perdre de l’argent ? Tant pis ».

« Ils prétendent que ce sont des jihadistes étrangers, saoudiens...Mais nous savons bien que la plupart d’entre eux sont des Palestiniens de l’intérieur du camp. Et ceux qui ne se sont pas battus à leurs côtés étaient quand même d’accord avec eux » dit Sahramen.

Sous son statut de fait de zone franche, Nahr al-Bared était connu dans toute la région nord de Tripoli pour ses prix bon marché. Des gens venaient de loin pour acheter de la nourriture, des vêtements et des tuiles de marchands du camp dont certains avaient prospérés.

« C’était un bon endroit pour faire des courses » dit Hassan Yassin (33 ans) appuyé sur son tracteur rouge. « Mais s’ils reviennent, même s’ils donnent gratuitement leurs marchandises, personne ne retournera dans ce camp ».

« Ce n’est pas leur terre » ajoute-t-il. « Si on leur permet d’y retourner, tout recommencera à nouveau dans les trois mois. »

Des têtes se retournent au bruit d’une grande explosion et les spectateurs voient un énorme panache de fumée noir et blanche et des débris qui volent dans le soir crépusculaire.

« Ahlan wa sahlan » disent Hassan Yassin et ses amis en riant.

« « Bienvenu » à Nahr al-Bared.

21 juin 2007 - Ya Libnan - Vous pouvez consulter cet article à :
http://yalibnan.com/site/archives/2...
Traduction : Ana Cléja

Lire aussi :
- Le sort des réfugiés palestiniens empire dans la plus grande partie du Moyen-Orient
- Mettre fin aux abus à l’encontre des Palestiniens qui fuient le camp de réfugiés de Nahr al-Bared


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