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Liban : Nahr al-Bared est une ville fantôme sur laquelle flotte une odeur de mort

mercredi 30 mai 2007 - 16h:43

IRIN

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Beyrouth, 28 mai 2007 : Les bombardements lourds de l’armée libanaise dans la nuit de vendredi sur le camp de réfugiés de Nahr al-Bared ont tué au moins 4 civils et blessé des douzaines d’autres.

Des témoins ont décrit des scènes de dévastation dans ce camp auparavant très peuplé, dévastations provoquées par les heurts militaires du week-end avec les militants islamistes.

« Nahr al-Bared ressemble à Leningrad » a raconté à IRIN le commandant de l’aile militaire de la faction laïque du Fatah, Bilal Aslan, qui avait passé la semaine dans le camp. Il faisait référence au siège allemand de la ville russe pendant la deuxième guerre mondiale.

« L’armée ne laisse entrer personne pour ne pas laisser voir les massacres qu’ils ont commis » dit-il.

Khaled al-Haj, l’officier de service de Nahr al-Bared pour l’organisation UNRWA qui a passé les premiers quatre jours du siège à l’intérieur du camp, a raconté à IRIN : « Nous n’avons ni électricité, ni eau ni nourriture. Des grandes zones du camp sont totalement détruites. Nahr al-Bared est une ville fantôme. La seule odeur qu’on peut sentir est celle de la mort ».

Coût en vies humaines

Selon les chiffres du Fatah et d’autres dirigeants communautaires à l’intérieur du camp, plus de 100 civils blessés restent coincés dans le camp et parmi eux au moins 10 blessés graves.

Alors que la crise entre dans sa deuxième semaine, il est toujours aussi difficile d’obtenir les chiffres exacts du nombre de morts et de blessés provoqués par la violence. Les media principaux rapportent que 20 civils, 30 soldats libanais et près de 60 militants ont été tués. Fatah al-Islam prétend que seuls 10 de ses combattants ont été tués.

Les chiffres de la Croix Rouge Palestinienne (PRC), le seul service d’ambulances d’urgence qui entre et sort du camp parlent de 84 civils blessés et 35 autres tués fin vendredi depuis que les bombardements sur le camp ont commencé le 20 mai.

Trois grandes explosions à l’intérieur et autour de Beyrouth la semaine dernière ont tué une femme et blessé 30 autres personnes.

L’ambassadeur saoudien au Liban, Abdul Aziz Khoja, a raconté dans une interview donnée à Al-Hayat et publiée dimanche, que 4 militants saoudiens qui combattaient pour le Fatah al-Islam sont morts. Plusieurs centaines de combattants d’Algérie, du Liban, de Syrie et du Yémen ainsi que des jeunes qui ont pris leur distance de la communauté palestinienne sont présumés faire partie de Fatah al-Islam.

Des maisons et les mosquées détruites

Selon Abu Jaber, un dirigeant communautaire travaillant dans le camp, plus de 200 maisons ainsi que cinq mosquées ont été totalement détruites dans le camp par les tirs de tanks et d’artillerie. L’armée dit qu’elle visait les positions du Fatah al-Islam. La mosquée la plus récemment touchée, Al Hawouz près du marché central auparavant animé du camp, hébergeait une clinique temporaire installée par le PRC mais elle a été rapidement abandonnée.

« Le premier obus est arrivé à travers le toit. Il faisait sombre et il y avait plein de poussières. Tout le monde criait. La fille de mon cousin âgée de huit mois, s’est évanouie à cause de sa peur » raconte Hafida Deeb Wehbe en décrivant le bombardement qui avait commencé vendredi vers 20 heures. « Les deuxième et troisième tirs ont atterri dans la rue, puis le quatrième a touché le dôme de la mosquée et l’a totalement détruite ».

Etant donné qu’aucune des cliniques régulières du camp ne fonctionnent plus, le PRC a monté deux cliniques temporaires sous tente raconte le Docteur Abdel Aziz de l’hôpital dirigé par le PRC Safad dans le camp voisin de Beddawi.

Le Dct. Aziz prévient que si l’armée met à exécution ses menaces d’entrer dans le camp il risque d’y avoir encore beaucoup plus de victimes.

« Si cette opération a lieue nous craignons qu’un grand nombre de civils soient touchés » dit-il.

Rweida Awad, une mère enceinte de 7 mois, et son mari Ibrahim Jundi ont fui mercredi le camp de Nahr al-Bared pour celui de Beddawi à 10 km de là. Ses jumeaux âgés de 18 mois, Waleed et Jinam, étaient tombés malades, souffrant d’une infection de la poitrine et de fièvre avant que le bombardement du camp ne commence.

« Les jumeaux criaient pendant toute la nuit et me tenaient la main. Nous avons laissé leur médicament derrière nous et ils n’ont pas eu de lait depuis des jours » dit Rweida qui craint qu’à cause du stress elle ne fasse une fausse couche.

Une source du Ministère de la Défense parlant sous couvert d’anonymat, a admis que l’armée était consciente que « beaucoup de civils étaient morts » mais il a répété une déclaration précédente disant que l’armée ne visait que les positions présumées du Fatah al-Islam.

Défi

Un groupe se faisant appeler l’Aile d’Al-Qaeda au Levant a juré de mener des bombardements sur le Liban et des attaques contre les chrétiens à moins que Beyrouth ne retire son armée des camps de réfugiés palestiniens.

« Nous vous prévenons pour la dernière fois, après quoi il ne restera rien d’autre que des mers de sang » a dit un porte-parole identifié comme étant le dirigeant militaire du groupe dans une vidéo envoyée vendredi par la branche d’un media utilisé par des groupes islamistes dont Al-Qaeda en Irak.

Hassan Nasrallah, le dirigeant du Hezbollah (l’organisation militante libanaise chiite qui a mené une campagne de 6 mois pour faire tomber le gouvernement libanais) a averti le gouvernement contre tout envoi de l’armée dans Nahr al-Bared en insistant sur une solution politique négociée.

Mais Abu Saleem Taha, le porte-parole du Fatah al-Islam, contacté samedi par IRIN, a dit que son groupe était toujours fort et qu’il était prêt à se battre jusqu’à la mort.

« Fatah al-Islam est prêt à mener ce combat dans tout le Liban. Nous ne nous rendrons pas et préférons nous battre et mourir en servant Dieu. Ce combat n’est qu’un début ».

Un calme tendu flottait au-dessus du camp après le bombardement alors que le gouvernement pressait les dirigeants palestiniens au Liban de décider d’une réponse unifiée à la crise, allumée dimanche dernier quand des militants du Fatah al-Islam ont tué 23 soldats libanais en représailles pour avoir essayé d’arrêter des gens soupçonnés d’avoir dévalisé une banque à Tripoli.

28 mai 2007 - IRIN - Pour consulter cet article :
http://www.irinnews.org/Report.aspx...
Traduction : Ana Cleja


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