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Risque sérieux de blocage du Tour de France si une équipe financée par Bahreïn y participe

samedi 11 juin 2016 - 14h:16

Jamie Merrill

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Des militants pour la défense des droits de l’homme pourraient bloquer le Tour de France si une équipe cycliste à financement bahreïni est autorisée à concourir à l’occasion de la plus célèbre course cycliste au monde.

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Un message des manifestants du Bahrein destiné au monde entier

La mise en garde des militants survient après qu’un prince bahreïni accusé d’avoir été impliqué dans la torture de prisonniers lors du soulèvement du pays en 2011 a annoncé son intention de créer une équipe cycliste professionnelle.

Le prince Nasser ben Hamed al-Khalifa a lancé Bahrain Cycling Team le mois dernier, alors que les spéculations dans le monde du cyclisme vont bon train quant à sa participation à l’UCI World Tour en 2017 avec environ 16,5 millions de dollars de financement.

Les militants projettent désormais de perturber le Tour de France l’an prochain si Bahrain Cycling Team se voit accorder une licence World Tour par l’UCI, l’organe dirigeant du cyclisme, et des protestations pourraient ainsi bloquer la course.

L’équipe bahreïnie devrait être présentée officiellement dès le mois prochain lors d’un événement en marge du Tour de France et pourrait faire signer en tant que leader Vincenzo Nibali, vainqueur du Giro d’Italia, selon Cycling Weekly.

Des militants bahreïnis en exil en Europe ont cependant indiqué à MEE qu’ils organiseraient une protestation lors de cet événement à moins que l’UCI ne refuse d’autoriser Bahrain Cycling Team à concourir.

Marc Owen Jones, universitaire et militant du groupe de plaidoyer Bahrain Watch, a expliqué qu’il existait une « possibilité réelle » de voir des activistes chercher à bloquer le Tour de France ainsi que d’autres compétitions cyclistes majeures de l’UCI World Tour si l’équipe du prince Nasser se voyait accorder une licence par l’UCI. D’autres activistes ont annoncé qu’ils prépareraient « des stocks d’œufs et de farine » en vue de l’événement.

« Il y a de plus en plus de colère et d’inquiétude à propos de la course, non seulement des Bahreïnis, mais [aussi] de la communauté du cyclisme, a déclaré Jones. En outre, puisqu’il s’agit d’un événement médiatique important diffusé dans un certain nombre de pays, celui-ci est susceptible de donner lieu à une coopération transnationale entre les activistes. »

Sam Walton, activiste des droits de l’homme basé au Royaume-Uni et fan de cyclisme, s’est également exprimé à ce sujet : « J’aime le cyclisme et je n’agirais jamais de manière à perturber une course cycliste, mais il se pourrait que des gens visent un entraîneur ou des sponsors. »

« Des fans sont déjà déçus par le fait que Bahrain Cycling Team soit utilisée pour laver le sang qui est sur les mains des tortionnaires. Ils feront en sorte que cela se sache. Le cyclisme sera une étape importante pour Bahreïn : quand les gens parleront de Bahreïn et du cyclisme, ils entendront toujours parler également de torture et de répression. »

Le Tour de France, dont le parcours couvre plus de 3 000 kilomètres, offre d’innombrables possibilités pour les manifestants de viser le cyclisme ou les véhicules de soutien des équipes. Brian Dooley, militant de Human Rights First, organisation basée à Washington DC, a convenu qu’il serait « relativement facile » de perturber des courses ouvertes telles que le Tour de France par rapport à des événements fermés, comme le controversé Grand Prix de Formule 1 de Bahreïn, mais a soutenu que les activistes devraient mesurer attentivement le caractère « contre-productif » d’une action directe.

S’il a souligné que les manifestations anti-apartheid lors de rencontres sportives dans les années 1960 et 1970 s’étaient révélées efficaces, il a cependant ajouté que cette tactique n’était plus « à la mode » et qu’il serait surpris de voir des manifestants bahreïnis tenter des actions similaires.

Ces projets de protestation font suite à l’envoi ce lundi par des militants des droits de l’homme d’une lettre conjointe au président de l’UCI, Brian Cookson, soulevant de « graves préoccupations » au sujet de Nasser.

La lettre a indiqué que de nombreuses allégations de violations des droits de l’homme ont été formulées contre Nasser et fait valoir qu’accorder à son équipe l’accès à l’élite du cyclisme représenterait une violation du code d’éthique de l’UCI pour les nouvelles équipes, qui doivent prendre en compte des dimensions « éthiques », notamment l’« image du cyclisme » et les « principes de transparence et de bonne foi ».

Sayed al-Wadaei, directeur du plaidoyer de l’Institut de Bahreïn pour les droits de l’homme et la démocratie (BIRD), l’un des groupes à l’origine de la lettre, a déclaré que les militants « [envisageaient] des actions » si l’équipe de Nasser était autorisée à prendre part au Tour de France.

« La nature du Tour de France nous donne certainement plus de possibilités pour protester, a-t-il indiqué à MEE. Nous sommes déterminés à faire entendre les voix des victimes. Nous allons faire en sorte qu’on ne les oublie pas. »

Al-Wadaei a estimé qu’il était « trop tôt » pour discuter des détails des protestations planifiées, mais a déclaré que Nasser avait annoncé la formation de l’équipe bahreïnie dans le but de « blanchir son passé ». « Il y aura des conséquences », a-t-il ajouté.

Nicholas McGeehan, chercheur spécialiste du Golfe au sein de Human Rights Watch, a averti que les protestations pourraient s’avérer « contre-productives » et a appelé à la place l’UCI à prendre au sérieux les allégations contre Nasser.

« C’est une bonne chose que l’UCI ait un code d’éthique, mais s’ils veulent que celui-ci ait un sens, ils devront observer très sérieusement le fait que Nasser a publiquement menacé des personnes, dont des athlètes, qui ont protesté contre un gouvernement dont les forces de sécurité tuaient des gens sous la torture, a-t-il affirmé. Si l’UCI n’y voit rien de problématique, les protestations pendant les courses seront probablement inévitables. »

Le gouvernement bahreïni a systématiquement rejeté les accusations de violations des droits de l’homme, tandis que l’année dernière, l’ambassade de Bahreïn à Londres a déclaré que les allégations contre Nasser étaient « complètement fausses » et « motivées par des raisons politiques ». L’ambassade a ajouté que la police britannique avait « refusé auparavant d’enquêter sur le prince Nasser en raison de l’insuffisance des preuves contre ce dernier ».

La campagne menée par le BIRD et les autres activistes contre le rôle de Nasser dans l’équipe cycliste survient après les manifestations menées en février par l’organisation contre le cheikh Salman ben Ibrahim al-Khalifa, président de la Confédération asiatique de football, qui a présidé la commission mise en place par Nasser pour identifier les athlètes qui avaient pris part à des manifestations, lorsque celui-ci était en lice pour remplacer Sepp Blatter à la présidence de la FIFA.

Bien qu’il ait commencé la campagne en tant que favori, il a finalement perdu face au secrétaire général de l’UEFA Gianni Infantino, alors que ses avocats ont nié son implication dans l’identification de footballeurs.

Des parallèles ont été établis entre les deux controverses sportives et des analystes estiment que le gouvernement bahreïni cherche à placer un membre de la famille régnante à un poste de premier plan du sport international afin de racheter l’image du pays. « Cette entreprise dans le monde du cyclisme pourrait tout aussi bien mal tourner dans la mesure où elle rappelle aux médias internationaux la situation épouvantable des droits de l’homme dans le pays », a expliqué Brian Dooley.

8 juin 2016 - Middle East Eye - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.middleeasteye.net/news/b...
Traduction : MEE - VECTranslation


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