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Il est vraiment temps que Abbas s’en aille !

vendredi 15 janvier 2016 - 17h:39

Lamis Andoni

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Quand une direction, élue ou pas, sollicite la bénédiction de l’occupant, elle perd automatiquement toute légitimité comme représentant de son propre peuple, écrit Lamis Andoni.

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Abbas, fantoche au service de l’occupant israélien, joue la comédie du pouvoir en compagnie d’un autre fantoche, Ban Ki-Moon

Mahmoud Abbas n’est plus capable de penser en dehors de la bulle qu’il s’est s’imposée à lui-même, et de ce fait il essaye constamment de mettre en avant ses qualifications comme « partenaire de paix » pour Israël aussi bien que son engagement à combattre « le terrorisme et l’extrémisme ».

Le fait qu’Israël mène une guerre quotidienne contre les Palestiniens, qui sont soumis à toutes les formes de terreur par l’armée Israélienne et les colons, ne semble pas faire obstacle à ce refrain appris par coeur.

Non pas qu’il soit inconscient de la réalité autour de lui, car le problème est plus profond qu’un simple oubli. Chaque fois qu’Abbas s’exprime, ses mots soulignent la mentalité d’assiégé et de servilité dans laquelle les dirigeants de jadis de la révolution palestinienne se sont laissés enfermer.

Le drame est que ni Abbas ni l’Autorité Palestinienne (AP) n’essayent de s’extraire du filet soigneusement tissé autour d’eux par les accord Oslo de 1993, puis par tous les accords suivants. Ils tombent au contraire de façon pathétique dans tous les travers d’une autorité impuissante.

Une priorité nationale

Dans son dernier discours ce mardi, Abbas est allé jusque prétendre que la survie de l’AP était une priorité nationale - une déclaration étrange si l’on considère que sa présence même à Bethlehem lors des célébrations orthodoxes chrétiennes de Noël, n’aurait pas été possible sans l’autorisation des autorités israéliennes d’occupation.

Il n’y a aucun doute que l’insistance d’Abbas pour maintenir en place l’AP est en grande partie une question d’intérêt personnel - non seulement directement les siens mais aussi ceux d’une élite palestinienne qui s’est épanouie sous Oslo. Cette élite comprend tout un réseau de fonctionnaires palestiniens du passé et du présent, une partie de l’intelligentsia et même une large part d’individus appartenant à des organismes non gouvernementaux.

Le problème est que beaucoup dans cette élite ont internalisé l’idée soujacente derrière la série d’accords avec Israël depuis Oslo, qu’un comportement adéquat pourrait faire gagner aux Palestiniens la « respectabilité » au niveau international ainsi qu’un état.

En conséquence, les soi-disant exigences de sécurité israéliennes - qu’Israël et les Etats-Unis ont fait en sorte d’intégrer dans chaque accord, et particulièrement dans les protocoles de Hébron, le Mémorandum de Wye River et la Feuille de Route pour la paix - sont devenues la mesure de principe « du bon comprtement palestinien » et de l’engagement à la paix.

Dans la pratique ces exigences de sécurité sans cesse redéfinies et renouvelées, ont servi d’excuse pour les vols de terres, la construction et l’extension des colonies juives - toutes illégales au regard du droit international – du déplacement des Palestiniens et de leur assassinat par les soldats à la gâchette facile, entre d’autres formes de punitions, le tout en violation de toutes les conventions internationales.

Le pire de tout est que ces soi-disant « exigences de sécurité », impliquèrent dès le début d’Oslo que le rôle de la direction palestinienne était de sauvegarder non seulement la sécurité des Israéliens mais aussi celle de la structure coloniale israélienne.

Une équation bancale

La sécurité du peuple palestinien comme de ses dirigeants n’a jamais été une question digne d’intérêt. Cette équation sécuritaire bancale a été essentiellement mise en place pour garantir les mains libres à l’armée israélienne et aux colons armés pour violer les droits des Palestiniens.

Israël a agi en toute impunité chaque fois qu’il a considéré sa sécurité remise en cause : ses agressions impitoyables en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza pendant l’Intifada de 2001, toutes celles qui ont suivi jusqu’aux guerres successives sur Gaza, étaient censées envoyer un message que tous les Palestiniens souffriront tant quand leurs dirigeants n’étoufferont pas la résistance à l’occupation.

Au lieu de contester les prémisses inhumains de la sécurité israélienne, définie de façon unilatérale, Abbas et l’AP en sont arrivés à faire leur l’idée américaine et israélienne que leur capacité de préserver la sécurité de l’occupant serait leur principal raison d’être.

Une annonce soudaine de la dissolution de l’AP peut ne pas être plausible ni même souhaitable. Une telle étape doit être très bien préparée car il s’agirait d’un saut énorme, quoique nécessaire. Mais le principal problème est qu’il n’y a aucune volonté politique, une absence désastreuse de vision stratégique.

Pour une large part, l’AP est peu disposée, ou peut-être incapable, d’offrir une telle vision parce qu’elle a clairement peur de perdre l’influence qu’elle veut conserver aux dépens de la cause et du peuple palestinien.

La seule solution ou début de solution est le renouvellement de la direction palestinienne, alors libérée d’Oslo de sorte qu’elle représente tous les Palestiniens de l’intérieur et de l’extérieur de la Palestine. L’AP a au contraire marginalisé et miné l’Organisation de Libération de Palestine (OLP).

Abbas dans son dernier discours comme dans ceux qui précèdent, était des plus désireux d’envoyer un message en Israël selon quoi l’AP s’est toujours pliée aux conditions d’un processus de paix inexistant, en réaction aux déclarations israéliennes avertissant d’un effondrement prochain de l’Autorité palestinienne.

Le chantage comme politique

Les colonies israéliennes sont elles-mêmes partie intégrante d’une politique de chantage permanent pour rappeler à l’AP qu’elle ne doit pas sortir, même une seconde, de la voie qui lui a été fixée. En conséquence, Abbas a renouvelé ses offres de service et les qualifications de l’AP pour limiter la résistance à « des démonstrations pacifiques » sous contrôle, comme si cela avait jamais empêché l’armée israélienne de répondre avec des tirs d’armes à feu et des kidnappings.

C’est la police de l’AP qui a empêché les manifestants d’atteindre les barrages de l’armée israélienne, réprimant les Palestiniens au lieu de les protéger contre les attaques constantes des troupes d’occupation.

Et le Hamas n’est pas épargné. Ses arrangements avec Israël, par l’intermédiaire de l’Egypte, impliquent également la prévention de la résistance dans Gaza sous blocus, dont les habitants continuent d’être exposés à l’arsenal de destruction hautement sophistiqué d’Israël.

La direction palestinienne rend les Palestiniens plus vulnérables en entretenant de façon intéressée l’illusion que le bon comportement et la protection de la sécurité israélienne sont une clé pour en finir avec l’ccupation. Quand le Conseil central de l’OLP a demandé à Abbas après son discours, de mettre en application une décision de l’OLP de suspendre la coordination répressive avec Israël, celui-ci avait répondu en qualifiant cette politique de « sacrée ».

D’un point de vue purement rhétorique il s’est à présent éloigné de la formule infâme selon laquelle « la sécurité d’Israël est sacrée », mais il a en fait annoncé à Israël que non seulement il se soumettait aux conditions israéliennes mais aussi qu’il les appliquait immédiatement, ce qui lui a valu un satisfecit de l’occupant.

Quand une direction, élue ou pas, sollicite la bénédiction de l’occupant, elle perd automatiquement toute légitimité comme représentant de son propre peuple.

Le temps est compté. Israël consolide à toute vitesse sa structure coloniale d’apartheid. Il est temps pour les Palestiniens, où qu’ils soient, de mettre sur pied une stratégie unifiée de libération, et ceux qui traîneront à l’arrière seront chassés et mis définitivement à l’écart.

Abbas peut soit continuer à vivre dans sa bulle, soit en sortir, mais celle-ci finira par éclater, expulsant tout ceux qui s’y complaisent depuis si longtemps.

Abbas peut soit continuer à vivre dans sa bulle, ou sortir de lui, mais la bulle finira par éclater et il va expulser tous ceux qui ont vécu en elle depuis si longtemps.

* Lamis Andoni est analyste et commentatrice pour le Middle Eastern and Palestinian Affairs. @LamisAndoni]

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7 janvier 2016 - Al-Jazeera - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.aljazeera.com/indepth/op...
Traduction : Info-Palestine.eu - Lotfallah


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