L’Âge du désespoir : les fruits du soutien occidental à la violence extrémiste
mercredi 18 novembre 2015 - 18h:23
Chris Floyd
Sans le crime américain qu’a été la guerre d’agression contre l’Irak - qui selon les décomptes des gouvernements occidentaux eux-mêmes, a tué plus d’un million d’innocents – il n’y aurait pas d’OEI, pas d’ « Al QaÏda en Irak. »
- Un attentat à la voiture piégée à Nasr City (Egypte), début septembre - Photo : Ahmed Soliman/AP/SIPA
Nous, l’occident avons renversé Saddam par la violence. Nous avons renversé Gaddafi par la violence. Nous essayons de renverser Assad par la violence. Tous des régimes brutaux – mais bien moins cruels que nos alliés saoudiens, et d’autres régimes tyranniques de part le monde. Quel a été le résultat de ces interventions ? Un enfer sur terre, enfer qui s’étend et devient plus virulent année après année.
Sans le crime américain qu’a été la guerre d’agression contre l’Irak - qui selon les décomptes des gouvernements occidentaux eux-mêmes, a tué plus d’un million d’innocents – il n’y aurait pas d’OEI, pas d’ « Al QaÏda en Irak. » Sans le financement et l’armement fournis par l’Arabie Saoudite et l’Occident à un agrégat de groupes sunnites extrémistes à travers le Moyen-Orient, utilisés pour frapper l’Iran et ses alliés par procuration, il n’y aurait pas d’OEI. Reculons un peu plus dans le temps. Sans la création directe et délibérée par les Etats-Unis et leurs alliés saoudiens d’un mouvement mondial d’extrémistes sunnites armés d’envergure pendant les administrations Carter et Reagan, il n’y aurait pas eu de guerre contre le terrorisme – et pas d’attaques terroristes ce soir à Paris.
Encore une fois, soyons aussi clairs que possible : le monde infernal dans lequel nous vivons aujourd’hui résulte de politiques et d’actions délibérées menées par les Etats-Unis au cours des dernières décennies. C’est Washington qui a mené et/ou soutenu l’écrasement de la résistance politique laïque au Moyen-Orient, afin de mettre au pas des dirigeants récalcitrants comme Nasser et soutenir des dictateurs corrompus et brutaux qui favoriseraient les projets états-uniens de domination politique et d’exploitation des ressources.
L‘histoire connue du dernier demi-siècle est très claire sur ce point. En remontant jusqu’au renversement en 1953 du gouvernement iranien démocratiquement élu, il est notoire que les Etats-Unis ont consciemment et délibérément propulsé des groupes confessionnels les plus extrémistes afin de saper une résistance laïque avec une plus large assise à ses visées de domination.
Pourquoi revenir sur cette « histoire ancienne » direz-vous quand du sang frais coule dans les rues de Paris ? Parce que si ce n’était cette histoire ancienne, ce sang ne coulerait pas ; et parce que la réaction aux dernières répercutions en date du soutien bipartisan à l’extrémisme religieux depuis des décennies sera certainement plus d’effusion de sang, plus de répression, plus d’interventions violentes. Qui à leur tour engendreront inévitablement encore plus d’atrocités et de bouleversements comme ceux que nous voyons à Paris ce soir.
J’écris par désespoir. Désespoir, bien sûr, dû à la dépravation manifestée par les assassins d’innocents à Paris ce soir ; mais désespoir plus profond encore causé par la dépravation des assassins notoires qui nous ont conduit à cet instant effroyable de l’histoire humaine ; ces personnages qui sous les dorures arpentent les allées du pouvoir des législatures occidentales depuis des décennies, tuant des innocents par centaines de milliers, écrasant l’opposition laïque à leurs dictateurs favoris – et encore, encore et encore – soutenant, finançant et armant des sectaires parmi les plus virulents de la planète.
Pour finir, une cause supplémentaire de désespoir : bien que ce bilan historique soit disponible pour tous, facilement accessible à partir des sources les plus traditionnelles, il est totalement ignoré, et continuera de l’être, à la fois par ceux qui se livrent aux jeux du pouvoir et par le public. Ce dernier continuera à soutenir les précédents tandis qu’ils reproduisent et répètent les mêmes vieilles politiques d’intervention, les mêmes vieux programmes de domination et de cupidité, encore, encore et encore – créant toujours pour nous tous de nouveaux enfers, et empoisonnant la vie de nos enfants, et de tous ceux qui viendront après nous.
* Chris Floyd est chroniqueur au magazine CounterPunch. On peut consulter son blog, Empire Burlesque, à www.chris-floyd.com
13 novembre 2015 - CounterPunch - Cet article peut être consulté à :
http://www.counterpunch.org/2015/11...
Traduction : Info-Palestine.eu - MJB