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Fuir au loin de cette maudite guerre

mardi 21 avril 2015 - 10h:57

Anonyme

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Les réfugiés de Syrie mettent leurs vies dans les mains des trafiquants tandis qu’ils essayent d’échapper à leur pays déchiré par la guerre. Voici l’histoire d’un jeune réfugié.

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Réfugiés syriens au Liban

Quand vous terminez un diplôme universitaire en Syrie, cela signifie que vous serez bientôt appelé pour le service national obligatoire, et c’est une question de semaines. Quelques mois plus tard, votre nom sera sur la liste des points de contrôle militaires qui se sont récemment répandus dans la ville d’Alep.

Il n’a pas fallu plus de quelques mois après avoir passé mon diplôme pour décider de partir pour l’Europe. C’était une décision que je n’avais pas osé prendre au cours des trois dernières années, mais la ville que j’aimais est aujourd’hui épuisée, dans tous les sens du terme. Ce n’est plus un endroit approprié pour qu’un jeune homme y puisse y vivre, juste après avoir terminé ses études universitaires.

J’ai commencé à organiser le voyage et je suis tombé d’accord avec un trafiquant en Turquie pour que je rassemble les 7000 dollars qu’il exigeaient afin de me conduire jusqu’à un des pays scandinaves.

À mi-chemin

En tant que Palestinien Syrien, juste imaginer de se rendre en Turquie en empruntant un itinéraire interdit a semblé une entreprise sans précédent. Beaucoup d’éléments de l’opposition syrienne armée considèrent tous les réfugiés palestiniens en Syrie comme des membres des « Shabiha » [miliciens palestiniens soutenant le régime de Bachar al-Assad]. dans le même temps, des éléments des forces gouvernementales nous considèrent comme des « terroristes ».

Voyager depuis la partie ouest d’Alep, qui reste sous le contrôle des forces gouvernementales, jusqu’au passage de Bab al-Salama à la frontière turque, signifie traverser plus de 40 points de contrôle dans trois gouvernorats différents : Alep, Hama et Idlib. Ceci signifie être interrogé et fouillé par les membres armés de différents groupes, spécialement les forces du régime, le Front Al-Nusra, Ahrar al-Sham, le Front Islamique et les forces kurdes.

Après 14 heures de voyage, j’ai finalement atteint la ville d’Izaaz qui est proche de la frontière avec la Turquie. J’ai passé les cinq heures suivantes dans un domaine situé à peine à une centaine de mètres du fossé qui sépare les deux pays. Ici, naturellement, je n’étais pas seul. Il y avait plus de 150 personnes autour de moi, en grande partie des femmes et des enfants. Comme moi, ils attendaient tous le moment adéquat pour franchir la frontière.

À un moment donné, le trafiquant - qui était de mèche avec le Front al-Nusra - nous a donné le signal pour courir de l’autre côté de la frontière. Il faut ensuite courir à travers un relief accidenté pendant une dizaine de minutes, au risque de tomber entre les mains des gardes frontière turcs qui vous frapperont au visage avec leurs matraques avant de vous renvoyer vers le territoire syrien.

En Turquie

J’ai passé ma première nuit en Turquie dans Adana. Pour la première fois depuis deux ans et demi, j’ai profité d’une nuit tranquille - il n’y avait aucun signe d’affrontements violents, aucun bruit de ces maudites armes à feu.

Mon premier objectif en Turquie était de rencontrer le trafiquant qui me ferait passer en Europe, puis de trouver un accord avec lui sur tous les détails à régler. Après quelques heures, j’ai rempli la partie de l’accord qui m’incombait en arrivant à un certain endroit près de Mersin. Là, Je me suis retrouvé en compagnie de centaines d’autres Syriens attendant l’heure H.

J’ai passé 17 jours en Turquie. J’ai entendu des douzaines d’histoires de Syriens qui s’étaient sauvés de la guerre atroce et avaient vendu tout ce qu’ils possédaient pour tenter de trouver une vie meilleure pour eux-mêmes et leurs familles sur le « Vieux Continent ».

Servir de repas pour les requins

Mon seizième jour en Turquie, le trafiquant m’a envoyé un message me disant que le bateau partirait dans quelques heures. J’ai passé les dernières heures à contacter ma famille et mes amis les plus intimes, leur disant que les requins en Mer Méditerranée auraient un repas savoureux au cours des prochains jours...

Le plan du contrebandier impliquait de recueillir au moins 1200 immigrants illégaux dans divers points le long de la côte turque. Ces immigrants ont été transportés dans des bateaux de pêche très vieux et très usés, jusqu’à un grand bateau attendant à un certain emplacement dans les eaux internationales faisant face à la côte turque.

Je me suis trouvé une place au milieu de 300 autres personnes serrées les unes contre les autres sur le dernier bateau de pêche partant de la côte. Après deux heures, nous avons atteint le bateau. Il était grand, mais pas assez pour transporter 850 personnes.

Nous avons été entassés dans un petit espace dans des conditions inhumaines. Pendant six jours, 850 personnes respirant, dormant et mangeant dans le même petit espace... Imaginez les ordures. Que serait votre réaction si je vous disais qu’il y avait parmi nous des dizaines de personnes âgées et handicapées, des enfants et femmes dont trois étaient enceintes ?

La terre promise

Après six jours épuisants, les ordures et l’air pollué cessèrent comme nous atteignions finalement la côte de Sicile avec l’aide des forces navales italiennes. Elles avaient eu connaissance de l’emplacement exact de notre bateau et nous avaient remorqués jusqu’à un port où la Croix-Rouge et Médecins Sans Frontières nous attendaient.

Nous avons été bien traités par les autorités italiennes. Elles nous ont donné de quoi manger et boire, ainsi que l’aide médicale à ceux qui en avaient besoin, avant de nous conduire aux camps de réfugiés sur l’île.

Le lendemain matin j’étais dans un train à destination de Milan, me rendant aux Pays-Bas où je vis maintenant. J’attends une décision au sujet de mon permis de séjour, pour pouvoir ensuite commencer une nouvelle vie, loin de cette guerre maudite.

15 mars 2015 - Al-Arabya al-Jadeed - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.alaraby.co.uk/english/fe...
Traduction : Info-Palestine.eu


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