Égypte : Mahmoud Ramadan, mis à mort pour l’exemple après un procès inique
mardi 10 mars 2015 - 10h:38
Wael Kandil
Mahmoud Ramadan a été mis à mort pour l’exemple, mais nombreux sont ceux qui estiment toujours qu’il vaut mieux mourir comme un lion que vivre comme un chien, nous dit Wael Kandil.
- Mahmoud Hassan Ramadan Abdel-Nabi, lors du simulacre de procès devant une Cour égyptienne aux ordres de la dictature - Photo : AP
La vitesse avec laquelle l’État égyptien a exécuté le militant anti-putsch Mahmoud Ramadan, est sans précédent dans l’Égypte moderne. Les prisonniers condamnés restent normalement dans leurs uniformes rouges du quartier des condamnés à mort pendant des années, jusqu’à ce que les gens en oublient presque leur existence.
Au cours des dernières deux semaines, il y a eu une toute une campagne de la presse égyptienne poussant à l’exécution de Ramadan, d’une manière qui a presque éclipsé la couverture de la conférence très annoncée des donateurs.
Après que Ramadan ait été exécuté, la télévision d’État a interrompu ses émissions pour annoncer que la scène de la pendaison de Ramadan serait bientôt diffusée.
En même temps, quelque chose s’était déjà produit qui ressemblait à toute une méthode pour faire accepter au public des scènes de meurtre, depuis la diffusion en boucle des scènes d’exécution des travailleurs égyptiens en Libye, à celle en boucle également de la pendaison et de la mutilation d’un chien. Cela a tout à fait l’apparence d’un plan délibéré pour désensibiliser les gens aux nouvelles et aux scènes de pendaison et d’immolation.
Le cas de Ramadan, dès le début et à la suite du coup de force contre le Président Mohamed Morsi, a été marqué par une intense propagande. C’était en fait en prélude aux massacres qui ont eu lieu pendant la dissolution des sit-ins anti-putsch, en vue de diaboliser les adversaires du putsch militaire.
C’était comme si les reportages diffusés par les chaînes de télévision pro-putsch, accompagnés d’insultes honteuses contre tous les islamiste, avaient préparé le terrain pour qu’interviennent les massacres. Et en effet, les massacres se sont produits devant le quartier général de la garde républicaine, puis au mémorial Manassa, culminant avec les massacres à la mosquée Rabia Al-Adawiya et aux squares d’Al-Nahda.
Les vidéos montrant la scène où des gens ont été jetés du haut d’un réservoir d’eau sur le toit d’un bâtiment à Alexandrie, montrent clairement que Ramadan, un ingénieur portant la barbe et le mari d’une jeune doctoresse, était tout à fait à l’écart de la scène du meurtre.
Cependant, sa barbe et son signalement général ont été saisis sur le moment par les médias et sont devenus le point de mire de serveurs de news et surtout de commentateurs hystériques, de telle sorte que le titre principal de l’évènement soit bientôt devenu : « Les islamistes Pro-Morsi tuent des enfants en les jetant du haut des toits ».
De la même façon que l’affaire Ramadan a été exploitée pour préparer le terrain pour l’assassinat en masse des militants anti-putsch, son exécution maintenant est exploitée pour préparer le terrain pour de nouveaux flots de sang, coulant cette fois-ci depuis les halls des Cours de justice au vu du grand nombre de peines de mort prononcées contre les dissidents.
Ce crime envoie un message
De la même façon qu’il a voulu que le massacre de la mosquée Rabia serve d’exemple pour quiconque oserait protester contre le coup de force, le régime exploite maintenant la mise à mort de Ramadan pour décourager tous ceux qui peuvent penser différemment
Pourtant selon des sources de police, Ramadan, sûr de son innocence, était calme et en paix avec lui-même dans ses derniers moments en ce monde.
Tout que nous savons indique que bien que 20 mois se soient écoulés depuis le massacre à Rabia, la flamme de la protestation et de la colère n’est pas retombée parmi les adversaires du coup d’État.
Ce meurtre de masse n’est pas parvenu à semer les graines de la crainte, ni à faire taire les opposants ou à les forcer à céder devant la force brutale par crainte pour leur propre sécurité.
Bien au contraire, les protestations se sont développées et elles continuent à se développer, et il est clair que les foules qui prennent la rue dans l’ensemble de l’Égypte estiment qu’il vaut mieux mourir comme un lion que vivre comme un chien.
Je ne crois pas que le message que le régime a voulu envoyer avec la pendaison de Ramadan, intimidera et découragera les protestataires et les dissidents.
En effet, les adversaires du coup de force se rendent compte que le chemin vers la liberté et à la dignité sera inévitablement jalonné par la mort et la torture, que ce soit par le marteau d’un juge, le fusil d’un soldat, ou le couteau d’un sicaire pro-régime.
Nous savons tous aujourd’hui que la justice est morte. Aucun des adversaires de l’oppression n’attend de justice d’un ordre judiciaire à la gâchette facile, ou d’un État qui a assassiné une révolution dont les objectifs étaient la justice, la dignité, et la liberté.
La majorité se rend compte qu’il ne peut plus y avoir de procès digne de ce nom, avec un jugement en bonne et due forme et une enquête appropriée. Ils savent maintenant que tout ceci a été remplacé par des sentences et des décisions répressives dont les objectifs sont politiques, quoique travestis par les robes longues des juges.
8 mars 2015 - Al-Araby al-Jadeed - Vous pouvez consulter cet article à :
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Traduction : Info-Palestine.eu