Dans les centres d’accueil des réfugiés à Gaza, les conditions de vie inconfortables et insalubres constituent un terrain propice pour la propagation des maladies contagieuses.
- Une femme avec son enfant dans les bras, prend part à une manifestation devant le siège de l’UNRWA pour protester contre la réduction de l’aide alimentaire pour les réfugiés, le 9 octobre 2013 dans la ville de Gaza - Photo : AFP
Khan Younis – L’une des situations qui peuvent affoler une mère est d’ignorer l’origine des symptômes qui affectent son bébé. Elle commence à courir dans tous les sens sauf qu’en temps de guerre, le seul endroit où elle peut aller est l’école de l’ONU où elle vit actuellement.
Agée de 29 ans, Arafa Abu Jamie est arrivée avec son bébé Remas Abu Jamie, ne sachant pas de quoi elle souffre. En effet, la petite de huit mois à peine présente une éruption cutanée visible et apparemment, des crampes d’estomac aigües, des vomissements et autres symptômes gastriques.
« Elle vomit et elle fait de la fièvre. Elle n’est jamais tombée malade au point d’aller à la clinique, sauf pour les vaccinations de routine, » explique la mère effrayée et anxieuse, alors qu’elle s’apprêtait à voir le médecin urgentiste de l’école de l’UNRWA de Khan Younis.
Abu Jamie et ses enfants se sont réfugiés ici suite au bombardement de leur maison par les missiles israéliens. 28 membres de la même famille ont été tués à l’intérieur de la maison sans compter les nombreuses autres personnes tuées par les missiles israéliens à l’Est de Khan Younis.
N’ayant plus aucun endroit où aller, cette école de l’UNRWA est désormais leur maison pour le futur proche. Mais pour le moment, Abu Jamie a une autre préoccupation et inquiétude. L’état de santé de son bébé s’est détérioré au cours des dix derniers jours et elle cherche à connaitre le diagnostic et avoir en urgence le traitement adéquat pour les symptômes que présente son enfant.
Des conditions difficiles et complexes
Dr Yamen Alshaer fait partie de l’équipe d’urgences de l’UNRWA. Il reconnait qu’il a du mal à faire face aux différentes pathologies, surtout qu’il ne dispose pas des médicaments nécessaire pour soigner les gens et sachant pertinemment que le cas de la gale (la maladie dont souffre le bébé d’Abu Jamie) est très difficile à traiter dans une école bondée et où dans chaque classe, environ 100 personnes dorment ensemble.
Une file de plus de cent personnes attendent devant une classe pour voir Dr Alshaer. Certains souffrent de gale aigüe, d’autres de poux, tandis qu’une autre catégorie se plaint de forte fièvre, de gastroentérite, de diarrhée et de vomissements. D’autres viennent avec de graves infections des voies respiratoires supérieures.
D’après Alshaer, il ne se passe pas un jour sans qu’on n’assiste à l’arrivée d’une pléthore d’enfants souffrant de problèmes gastriques. Certains peuvent être traités, d’autres non. Le médecin enregistre la présence d’un grand nombre d’enfants présentant des cas de déshydratation sévère et qui sont obligés d’attendre patiemment la consultation dans les installations de fortune de l’école.
« Ces symptômes sont la combinaison du manque d’hygiène, du surpeuplement, de la mauvaise nutrition et d’une hydratation insuffisante parmi les gens présents dans ces centres d’accueil de réfugiés, » explique le médecin.
Abu Jamie repart avec le traitement nécessaire pour la journée. Toutefois, elle doit se présenter dans une autre clinique pour le suivi de l’évolution du cas de sa fille. Elle ne peut pas partir à l’hôpital de Khan Younis car elle sait qu’il doit être submergé des urgences provoquées par les attaques israéliennes, et que la priorité ne sera pas accordée aux patients avec des symptômes secondaires.
Abu Jamie est originaire de l’Est de Khan Younis mais ne peut s’y rendre à cause de la présence militaire israélienne là-bas. C’est pourquoi, elle doit se présenter à une autre clinique de l’ONU où le médecin ausculte environ 200 personnes durant sa période de travail de six heures. Malheureusement, le fait d’attendre son tour, même si c’est moins de deux minutes, suffit à la maladie de se propager très rapidement.
Actuellement, à Gaza, l’ONU ne peut plus maîtriser les urgences qui dépassent ses capacités de répondre à plus de 450.000 civils déplacés cherchant refuge dans ses écoles et dans celles du gouvernement, dans les hôpitaux, dans les places publiques, dans les églises ou chez des proches. Partout c’est surpeuplé, peu hygiénique. Les gens sont mal nourris et déshydratés, sans oublier les graves pénuries en fournitures médicales.
Cependant, le problème majeur qui guette les réfugiés reste la gale et les poux du corps et de la tête. A ce titre l’UNRWA a distribué des prospectus qui expliquent aux gens comment éviter ces situations dans des circonstances normales.
Mais les Gazaouis se retrouvent dans des circonstances plus anormales que d’habitude. Eviter la propagation de ce fléau est tout simplement impossible au vu des circonstances actuelles.
Une femme est arrivée dans la clinique parce qu’elle n’a pas trouvé d’endroit dans les écoles pour se laver. Elle affirme que ses enfants et elle n’ont pas pris de douche pendant cinq semaines, soit depuis le début de l’offensive israélienne.
Dans la file d’attente, Hosni Abu Rida est lui aussi atteint de gale au niveau des jambes et qui se répand sur le reste de son corps. Il a peur que son épouse et leurs huit enfants contractent les symptômes. Il est arrivé d’une école voisine, Sheikh Jaber, où il n’a pas été en mesure de trouver un médecin pour sa famille. C’est une humiliation extrême, lui qui vivait depuis longtemps avec sa famille paisiblement et confortablement dans une villa. A présent, il ne lui reste pas grand-chose, son commerce est fermé et son argent est épuisé.
Son fils Abdullah Abu Rida, 11 ans, souffre de vomissements aigus et n’arrive pas à tenir dans la file d’attente. La puanteur se dégageant des eaux usées dans l’école où ils se réfugient est insupportable et intolérable, mais l’endroit demeure l’unique « refuge sûr » pour sa famille. Ces écoles n’ont pas été construites pour répondre à cette immense capacité de malades et de gens désespérés fuyant les attaques, c’est pourquoi, le système de refuge dans les écoles s’effondre rapidement.
« Cela fait deux semaines consécutives que nous dormons à même le sol et juste à côté de nous se trouve un regard des eaux usées inondé, » souligne-t-il.
Il explique que les camions ont tenté de pomper l’eau des égouts quatre fois dans la même journée, mais dans l’heure qui suit, le sol est de nouveau inondé. La famille se couche dans le seul petit espace qu’elle trouve.
Il estime que l’ONU doit en urgence ouvrir de nouveaux refuges pour les Gazaouis car il n’y a plus assez d’espace et de plus en plus de gens sont contraints de se réfugier sur des sols inondés d’eaux usées.
A ce titre, Dr Alshaer précise : « Chaque classe héberge 100 personnes. Si chacun d’entre eux porte un virus, il contaminera assez vite tous les autres. »
« Un jour, j’ai soigné un enfant et le lendemain, je reçois sa sœur, son frère ou son voisin qui vient me voir avec des symptômes similaires, » ajoute le médecin qui essaie de faire baisser la fièvre de la petite Remas Abu Jamie, ayant atteint 40 degrés.
On craint aussi que si ces conditions et cette situation persistent, c’est toute la population qui serait exposée à davantage de maladies mortelles, comme la méningite, la dysenterie et le choléra.
Abu Rida souffre d’un terrible traumatisme dans sa vie. Son fils et son frère ont été tués par un raid aérien israélien qui a frappé l’Est de Khan Younis la semaine dernière. Il craint que ces conditions finissent par emporter les survivants de sa famille.
« Nous avons échappé à une mort quasi-certaine sous les feux israéliens, mais à présent, il semble qu’Israël ne veut pas nous tuer un à un avec ses missiles, mais plutôt avec la maladie, » déplore-t-il.
* Mohammed Omer est un journaliste palestino-néerlandais renommé, basé à Gaza.
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11 août 2014 - Middle East Eye - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.middleeasteye.net/news/g...
Traduction : Info-Palestine - Niha