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Brigades des Martyrs al-Aqsa : le retour à la résistance armée ?

samedi 28 septembre 2013 - 16h:35

Naela Khalil

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La mort de deux soldats israéliens le week-end dernier, dans les villes de Cisjordanie de Qalqilya le 21 septembre et à Hébron le 22 septembre, a considérablement renforcé les tensions qui règnent en Cisjordanie depuis la reprise des négociations le 30 juillet. La Cisjordanie a subi plusieurs incursions des forces d’occupation israéliennes au courant du mois d’août, et qui se sont soldées par l’assassinat de six Palestiniens.

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15 mai 2013 - Des membres du Fatah portent leurs armes, tandis qu’ils prennent part à un défilé pour marquer le 65e anniversaire de la Nakba palestinienne, dans le camp de réfugiés de Ein al-Hilweh, près de la ville portuaire de Sidon, dans le sud du Liban - Photo : Reuters/Ali Hashisho

La succession des événements donne à présent le sentiment que la troisième Intifada est proche, ce qui laisse présager l’effondrement des dites négociations de paix entre Palestiniens et Israéliens. Cela indique également que la résistance palestinienne armée a repris ses activités, Israël tenant les Brigades des Martyrs d’Al-Aqsa, liées au Fatah, pour responsables de la mort du soldat israélien à Hébron. Mais l’organisation Fatah al-Intifada, qui a rompu avec le Fatah il y a des décennies, a rapidement revendiqué la responsabilité de cette opération dont les circonstances restent cependant floues.

Omar Abu Arkoub, un journaliste spécialisé dans la presse en hébreu, a déclaré à Al-Monitor que les médias israéliens "s’étaient empressés de tenir les Brigades des Martyrs d’Al-Aqsa affiliées au Fatah pour responsables de l’opération d’Hébron, et ont commencé une campagne contre le Fatah et l’Autorité palestinienne [AP]. Les [médias israéliens] ont accusé l’Autorité palestinienne de ne pas condamner le meurtre d’Israéliens, affirmant même que certains dirigeants de l’Autorité palestinienne étaient coupables d’incitation".

Alimentant cette campagne de presse israélienne, des déclarations enflammées circulent dans la population palestinienne d’Hébron, comme celles d’Abbas Zaki , originaire de la ville et membre du Comité central du Fatah, qui a rappelé dans des déclarations à la presse que le soldat israélien tué à Hébron n’était pas là pour un pique-nique.

Les accusations israéliennes visant le Fatah, les déclarations enflammées de certains dirigeants du Fatah, les appartenances politiques des martyrs qui tombés dans deux camps de réfugiés - celui de Qalandia, près de Ramallah et celui de Jénine , ainsi que les accrochages armés entre forces supplétives [de l’AP] et certains membres du Fatah dans les camps de Naplouse, portent à croire que l’aile militaire du Fatah est revenue à l’avant-garde de la résistance armée en Cisjordanie. N’oublions pas une petite présence des Brigades Al-Quds du Jihad islamique, dont un militant a été assassiné par les forces d’occupation dans le camp de Jénine sur le 17 septembre dernier.

"Les Israéliens ont dans le passé accusé les Brigades des Martyrs d’Al-Aqsa et d’Al-Quds de contrôler les camps de réfugiés palestiniens, en particulier dans les régions du nord de la Cisjordanie, ce qui constitue une menace pour Israël mais aussi pour l’Autorité palestinienne", explique à Al-Monitor Khalil Chahine, un écrivain et analyste politique au Centre palestinien pour la recherche politique et les études stratégiques.

Bien qu’il dise difficile "de condamner les opérations [de résistance] de Qalqilya et d’Hébron en raison de l’augmentation des violations israéliennes qui fournissent un terrain fertile pour le développement d’initiatives de la résistance palestinienne, organisées ou individuelles", Chahine ajoute : "Prouver que les Brigades Al- Aqsa étaient responsables de la mort des deux soldats entraînerait de graves problèmes pour le Fatah, dont les dirigeants mènent des négociations avec Israël."

"Une déclaration de Fatah Al-Intifada revendiquant l’exécution du soldat israélien à Hébron, a été diffusée dans les médias. Il faut faire une distinction entre le Fatah et le Fatah Al-Intifada - lequel a rompu avec le Fatah qui est investi maintenant dans le processus de paix - et souligner la nature hostile de la relation entre les deux", a déclaré à Al-Monitor Nabil Amro, un chef du Fatah en vue.

Fatah Al-Intifada est une faction palestinienne qui a quitté le Fatah en 1983 pour s’opposer à Yasser Arafat, avec le soutien syrien. Cette organisation est toujours active en Syrie, en Jordanie et au Liban, et elle n’avait auparavant jamais joué de rôle dans les territoires palestiniens sous occupation, jusqu’à l’opération de Hébron dont elle a rapidement revendiqué la responsabilité dans un communiqué publié dans les médias.

Mais, selon Chahine, ce qui augmente la probabilité que les Brigades Al-Aqsa soient malgré tout responsables de ces deux opérations est "l’apparition publique de militants armés des Brigades Al-Aqsa dans les camps de Naplouse et de Jénine, dans le nord de la Cisjordanie. Cela signifie probablement que les conflits internes font rage à l’intérieur du Fatah d’une part, et entre les agences supplétives [de l’AP] et les membres armés du Fatah de l’autre."

"Tous les noms qui circulent - comme les Chevaliers d’Hébron et les Brigades Yasser Arafat et autres groupes - sont tous des pseudonymes pour les Brigades des Martyrs d’Al-Aqsa, la branche militaire du Fatah. Les différentes structures sont apparues probablement parce que la plupart des membres des Brigades d’Al-Aqsa ont signé des engagements avec Israël et l’Autorité palestinienne de ne pas s’engager dans des actions armées, en échange d’un pardon [pour leurs activités de résistance] et d’une promesses de ne pas être la cible de tentatives d’assassinat ou d’enlèvement, comme stipulé dans le plan américain Dayton de 2006 qui visait à démanteler la branche militaire des Brigades des Martyrs d’Al-Aqsa et à remplacer ses chefs militaires par des dirigeants politiques", selon un jeune responsable du Fatah qui s’exprimait devant Al-Monitor sous couvert de l’anonymat.

Ahmed Abu Al-Azm, un analyste politique et professeur à l’Université de Birzeit en Cisjordanie, estime qu’il y a encore des Palestiniens qui font bon accueil aux opérations militaires et cautionnent la résistance armée, sans conditions ou stratégie particulières.

"Ceux qui appuient les opérations militaires contre l’occupation israélienne peuvent ne pas appartenir à une organisation politique en particulier, ou sont peut-être des membres du Fatah qui proclament encore appartenir à son aile militaire, les Brigades des Martyrs d’Al-Aqsa, et qui ont conduit l’opération de résistance armée lors de l’invasion du camp de réfugiés de Qalandia en août 2013 et l’opération de Qalqilya. Il est certain que ces opérations ont considérablement déstabilisé l’ex-président Mahmoud Abbas, qui ne veut pas entendre parler de résistance armée. Sa colère est démultipliée par le fait que certains membres du Fatah – l’organisation dont il est le chef - cautionnent et font la promotion de ce type d’actions de résistance", dit Abu Al-Azm.

À la lumière de tout cela, personne n’a été surpris par les divergences dans les médias entre Palestiniens et Israéliens concernant la position d’Abbas sur l’exécution des deux soldats. Pendant un certain temps, les médias palestiniens ont relayés son communiqué mot pour mot : "Nous condamnons et dénonçons les meurtres, et demandons que les Israéliens condamnent également les meurtres", leurs homologues israéliens disant simplement que Abbas a condamné les meurtres et présenté ses condoléances aux familles des soldats.

Les faits sur le terrain sont donc la preuve du retour des Brigades des Martyrs d’Al-Aqsa sur le devant de la scène de la résistance en Cisjordanie, d’une manière qui va au-delà des simples accusations portées contre elles par les forces d’occupation, et qui consiste à engager réellement ces mêmes forces dans une confrontation militaire quand celles-ci lancent leurs raids nocturnes dans les camps de réfugiés. Les Brigades s’affrontent également, même si plus discrètement, aux autres factions à l’intérieur du Fatah dont la position officielle met l’accent sur les négociations alors que certains de ses membres défendent toujours le droit à la résistance armée.

* Naela Khalil est une journaliste travaillant pour le quotidien palestinien Al-Ayyam. Elle a réalisé des reportages pour l’agence des nouvelles humanitaire de l’ONU et l’agence d’analyse IRIN, le magazine Al Maraa el-Muslema de l’UAE, le quotidien jordanien Al-Dustour et le bureau An-Najah pour les médias.

25 septembre - Al-Monitor - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.al-monitor.com/pulse/ori...
Traduction : Info-Palestine.eu - al-Mukhtar


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