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Les Accords d’Oslo ont mené à l’Apartheid

lundi 16 septembre 2013 - 06h:18

Haidar Eid

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Les Accords d’Oslo ont échoué à tous les points de vue, tout simplement parce qu’ils ont ignoré l’existence des Palestiniens en tant que peuple.

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Scène quotidienne en Palestine occupée - État colonialiste, belliciste, raciste, ségrégationniste, Israël ne jure plus que par l’édification de murs

Afin de comprendre les Accords d’Oslo et les terribles dommages qu’ils ont infligé à la cause palestinienne, il faut replacer le soit-disant « processus de paix » dans son contexte historique.

Les Accords d’Oslo ont prétendu être le premier pas vers l’autodétermination et à un État indépendant pour les Palestiniens. Mais il est clair maintenant, 20 ans après la célèbre poignée de main sur la pelouse de la Maison Blanche, qu’aucun État ne verra le jour à court terme - en raison du simple fait que Oslo a ignoré l’existence du peuple palestinien en tant que peuple. En d’autres termes, ces accords ont offert au sionisme ce qu’il a toujours voulu. L’infâme déclaration de Golda Meir qu ’« il n’y a pas de Palestiniens » en est un bon exemple.

Et pourtant, prétendre que « Oslo » était une grande opportunité et une « percée », et que le soit-disant « processus de paix » était sur ​​la bonne voie jusqu’à ce que les Palestiniens le fasse dérailler, est une déformation idéologique délibérée de la réalité, dans le but de pousser les Palestiniens à encore plus de concessions.

Il n’y a pas eu de véritable paix à Oslo, mais plutôt la mise en œuvre d’un plan israélo-américain pour résoudre le « conflit » après la destruction de l’Irak et l’effondrement de l’Union soviétique, et pour imposer un « nouveau Moyen-Orient » - pour reprendre les mots de Condoleezza Rice. Un Moyen-Orient sous hégémonie américano-israélienne et soutenu par les régimes arabes despotiques.

Les accords d’Oslo étaient morts-nés parce qu’ils ne garantissaient pas les droits nationaux et politiques minimaux aux trois composantes du peuple palestinien : dans la diaspora, en Israël et en Cisjordanie et à Gaza.

Tant que il y aura les réfugiés, les détenus, les blocus, les colonies, la « torture morale » des prisonniers, la dépossession, les assassinats et l’occupation, la paix globale ne peut être atteinte. C’était une illusion dans l’esprit de ceux qui ont signé les accords d’Oslo .

L’assujettissement des Palestiniens

Ces accords ont conduit à la création d’une « autonomie administrative » limitée à la bande de Gaza et à certaines parties de la Cisjordanie. La population locale s’est vue donner « le droit » de former une autorité qu’elle puisse appeler « nationale ». Il est maintenant devenu évident que, malgré les fameuses poignées de mains sur la pelouse de la Maison Blanche et le discours optimiste sur le « nouveau Moyen-Orient » », ces accords n’ont pas garanti la création d’un État palestinien souverain et indépendant, le retour des réfugiés , la démolition des colonies juives en croissance permanente, l’indemnisation des Palestiniens qui ont perdu leur maison ou leur propriété, la libération de tous les prisonniers politiques, ou l’ouverture de tous barrages militaires.

Toutes les poignées de main, les embrassades et les conférences de presse amicales n’ont pas non plus empêché Israël de lancer une des plus sanglantes attaques de son histoire. Dans la guerre de 2009 sur Gaza, les forces israéliennes ont tué plus de 1400 personnes - dont 438 enfants, 120 femmes, 95 personnes âgées, 16 médecins, cinq journalistes, cinq femmes de nationalité étrangère - et détruit plus de 40 000 bâtiments et maisons, laissant de nombreuses familles sans abri. Et pour ajouter l’insulte à l’injure, l’attaque d’Israël sur Gaza en 2012 a conduit à la mort de plus de 150 civils et à plusieurs milliers de blessés. Cela, bien sûr, n’a pas été mentionné comme un objectif des accords d’Oslo, mais rien, non plus, n’a été dit qui empêcherait une telle saignée d’avoir lieu.

Telle est la réalité politique que les responsables palestiniens qui ont signé l’accord ne veulent s’entendre rappeler. En fait, ce qui a été créé dans certaines parties de la bande de Gaza et la Cisjordanie est une entité très étrange - un sorte d’apartheid bantoustan avec le tampon de la communauté internationale.

Je dirais que la bande de Gaza ( 2009, 2012 ) est l’image reflétée dans le miroir d’Oslo. On doit se rappeler dans ce contexte que 75-80% des habitants de Gaza sont des réfugiés dont le droit au retour est garanti par le droit international, un droit qui a été totalement ignoré par Oslo. En fait, ce que les accords ont créé dans la bande de Gaza et la Cisjordanie, c’est deux mondes séparés, dirigés tous deux par des institutions non démocratiques, de nombreux appareils de sécurité, de tribunaux militaires, la corruption, la mauvaise gestion, l’inefficacité et le népotisme - en ne citant que quelques-unes de leurs qualités (néo)coloniales.

Israël comme un État d’apartheid

En gagnant les guerres de 1948, 1956 et 1967 et en obtenant une reconnaissance internationale, arabe et palestinienne, Israël - comme État colonial apartheid - a voulu passer à une nouvelle étape, laquelle nécessite la formation d’ une « nouvelle conscience » parmi les Palestiniens colonisés. C’est là que réside le danger d’ Oslo : la création d’un nouveau paradigme dans lequel la conscience de l’ennemi désigné (« l’autre ) est lavée et remplacée par une mentalité unidimensionnelle, à travers la construction d’une fiction - deux États pour deux peuples - dont l’objectif est absolument hors de portée.

Autrement dit, viser à créer une solution à deux États, c’est vouloir créer une fausse conscience dirigée par une intelligentsia complaisante, dont certains membres ont un passé révolutionnaire. Crier les slogans de « la solution des deux États », « deux États pour deux peuples », « le retour aux frontières de 1967 », ou même « une trêve à long terme », comme proposé par le Hamas - est destiné à garantir la subordination et la soumission des Palestiniens. C’en est fini du droit au retour des six millions de réfugiés et de leur indemnisation, ainsi que des droits de la population indigène de la Palestine de 1948, aujourd’hui citoyens de seconde zone en Israël.

Cet objectif, toutefois, ne voit jamais l’antithèse qu’il crée suite aux déplacements, à l’exploitation et à l’oppression. Il ignore la conscience révolutionnaire telle qu’elle a été formulée au cours des différentes phases de la lutte palestinienne.

Il ne tient pas compte de l’héritage de la résistance civile et politique qui est devenue une marque de fabrique de la lutte palestinienne. D’où la nécessité de la formulation d’une politique palestinienne alternative. La corruption de l’Autorité palestinienne et l’écart de classe énorme que les accords d’Oslo ont produits, ont généré en retour un processus de dé-osloisation dont des manifestations importantes sont : le lancement de l’appel de 2005 pour le Boycott, le Désinvestissement et les Sanctions - un appel repris et soutenu par la quasi-totalité de la société civile palestinienne - et les appels pour un état laïc et démocratique sur toute la Palestine historique, c’est à-dire un seul État pour tous ses citoyens, indépendamment de leur appartenance ethnique ou religieuse.

La bande de Gaza , cependant, est considérée par l’Autorité de Ramallah comme l’un des trois éléments constitutifs d’un État indépendant, même si elle est géographiquement séparée de la seconde, la Cisjordanie. Le troisième bloc, Jérusalem, est sous contrôle total israélien. Aucun Palestinien dans les territoires occupés n’imagine une seule seconde que les zones « semi- autonomes » dans la bande de Gaza et la Cisjordanie - mais seulement celles qui relèvent de la catégorie A - pourraient jeter les bases d’ un État indépendant. Ce à quoi Oslo a conduit en réalité, c’est à un nouvel apartheid dans le style de l’ex-Afrique du Sud.

Les chefs tribaux des bantoustans sud-africains servaient à faire croire qu’ils étaient les chefs d’États indépendants. Heureusement, le Congrès national africain, en dépit de ses nombreux compromis avec le Parti national, n’avait jamais accepté l’idée de la séparation et des bantoustans. La direction palestinienne officielle,cependant, se vantait à la fin du millénaire d’avoir jeté les bases d’ un bantoustan, affirmant qu’il s’agissait d’un État indépendant en gestation. Pour garantir la présence du sionisme en Palestine, l ’« Autre » doit être assimilé et réduit en esclavage sans être conscient de son esclavage. D’où, dans la logique des accords d’Oslo, l’octroi de la « semi- autonomie » sur les villes palestiniennes les plus peuplées.

Répéter à satiété le slogan raciste de la solution à deux États, en portant le drapeau palestinien et en chantant l’hymne national et la reconnaissance d’Israël, tout en ignorant les droits des deux tiers du peuple palestinien, c’est cela les Accords d’Oslo, et rien d’autre.

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* Le Dr. Haidar Eid est un professeur associé aux Etudes Culturelles à l’université gazaouie d’Al-Aqsa. Il est au conseil d’administration de la Campagne Palestinienne pour le Boycott Académique et Culturel d’Israël, et analyste politique au Al-Shabaka : The Palestinian Policy Network

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- Sharpeville 1960, Gaza 2009 - 27 janvier 2009

13 septembre 2013 – Al Jazeera - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.aljazeera.com/indepth/op...
Traduction : Info-Palestine.eu - Naguib


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