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Vies sous occupation : mon échec à trouver un travail n’a rien à voir avec une quelconque incapacité

mercredi 16 janvier 2013 - 06h:23

PCHR Gaza

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Le blocus imposé à la Bande de Gaza entre dans sa sixième année. Depuis sa mise en place, il a paralysé un nombre considérable de secteurs, déstabilisant ainsi le quotidien des Palestiniens en empêchant la plus grande majorité des gazaouis d’assurer leurs moyens de subsistance et de jouir de leur droit à un niveau de vie adéquat et suffisant.

Transformer la Bande de Gaza en une prison à ciel ouvert a donc impliqué l’interdiction des importations des biens et des marchandises, notamment les produits industriels et agricoles. Ces mesures ont alors fini par étouffer l’économe dans la Bande et à limiter toutes les chances de sa relance.

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Ahmed al-Akhras, 26 ans, est titulaire d’un master en journalisme, et au chômage...

L’une des conséquences directes du blocus reste sans doute le chômage endémique qui sévit notamment chez les jeunes qui représentent environ 53% de la population gazaouie. En effet, plus de 58% des jeunes Palestiniens, âgés entre 20 et 24 ans sont sans emploi. Aussi, 39% de la population vivant dans la Bande de Gaza vit au-dessous du seuil de la pauvreté, une situation due essentiellement au chômage.

Ahmed al-Akhras fait partie de cette jeunesse en détresse. Agé de 26 ans et titulaire d’un master un journalisme, Ahmed raconte : « Pour moi, le journalisme est plus qu’un métier ; c’est une passion. J’aspirais à faire carrière dans ce domaine afin de pouvoir aborder les questions qui rongent la société palestinienne et qui étranglent la population. Toutefois, et bien que j’aie obtenu mon diplôme en Mauritanie, je peine réellement à trouver un emploi. »

Il explique : « Lorsque j’ai fini mes études en 2011, on m’a offert un poste à Wafa News Agency en Cisjordanie. J’étais très heureux de travailler là-bas, sauf que ma joie n’a pas trop duré parce que ma demande de voyage a été bloquée par les autorités israéliennes. En juin 2001, j’ai été assujetti à une entrevue de sécurité, mais jusqu’à ce jour, je n’ai reçu aucune réponse. Conséquence logique de ce blocage, mon poste a été proposé à une autre personne. » Il poursuit : « Après avoir été profondément découragé par cette opportunité manquée, j’ai commencé à chercher du travail dans la Bande de Gaza. Ce fut également très frustrant de se retrouver sans un emploi rémunéré alors que j’ai un master et que j’ai réussi à acquérir une bonne expérience grâce aux stages pratiques. »

Un cursus qui n’a pas été gratuit puisque Ahmed reconnaît avoir beaucoup dépensé pour ses études. Il déplore : « Il est extrêmement pénible et bouleversant de devoir demander de l’argent à mes parents. En fait, nous sommes tous embarrassés par cette situation, sachant qu’ils ont tout donné pour moi et qu’ils n’ont pas hésité un seul instant à payer mes études et à me soutenir financièrement lorsque j’étais à l’étranger. Je dis cela car le scénario idéal aurait été que je décroche un job à mon retour pour devenir le principal soutien financier de la famille. »

Ahmed ajoute : « Mes études ont coûté aux environs de 27.000$US, sans compter les frais de 6 mois de stage pratique auprès de l’attaché de presse de l’ambassade de Palestine en Mauritanie. J’étais à deux doigts de la réalisation et de la concrétisation de mes projets et de mes rêves car j’y ai durement et sérieusement travaillé. J’ai décroché un poste en Cisjordanie mais hélas, tout est fini avant même de commencer. Mon échec à trouver un emploi n’est pas synonyme de mon inaptitude, bien au contraire, je connais très bien mes compétences et je sais de quoi je suis capable. Je sais également que je suis en mesure d’apprendre encore et encore pour réussir ma carrière. »

Outre le chômage, Ahmed se sent endetté envers ses parents et avoue : « A présent, je vis avec le sentiment de culpabilité d’avoir coûté aussi cher à mes parents et de ne pas être en mesure de les récompenser et de leur rendre ce qu’ils ont déboursé pour me voir réussir. Ce qui me torture le plus est qu’ils se sont complètement investis pour moi, financièrement et affectivement. Comme tous les parents, les miens souhaitaient voir leur fils devenir un bon journaliste, responsable et appliqué dans son travail. Malheureusement, même leurs rêves ont été brisés. »

Interrogé sur les principales difficultés rencontrées lors de ses demandes d’emploi, Ahmed explique : « J’ai tellement besoin de travailler que j’ai décidé de ne plus mentionner mon master lorsque je formule des demandes d’emploi. C’est ironique, mais à plusieurs reprises mes demandes ont été rejetées car on a jugé que j’étais surqualifié. En outre, le Palestinien que je suis doit à chaque fois faire face aux questions liées au favoritisme, à la partialité et aux a priori lorsque le travail est en dehors de la Bande de Gaza. »

S’agissant des démarches à entreprendre pour parer aux problèmes de l’emploi, Ahmed répond : « Je ne connais pas de solution collective, autrement je l’aurais saisie. Mais dans mon cas, il est clair que le blocus est la cause principale, car j’avais l’opportunité de travailler en Cisjordanie n’était-ce le refus des autorités israéliennes. C’est tout simplement injuste : je me bats pour joindre les deux bouts alors que je suis assez qualifié pour décrocher un poste convenable. C’est la preuve manifeste de la défaillance de leur système d’évaluation et de sélection qui m’a empêché d’aller travailler en Cisjordanie où j’aurais pu réaliser mes rêves comme chaque individu qui aspire à le faire. »

Ahmed n’a pas vraiment besoin d’exprimer son chagrin par les paroles : sa voix traduit clairement la tristesse qui s’abat sur un jeune ambitieux comme lui : « Je ne suis ni paresseux ni incompétent, je suis instruit et éduqué, seulement voilà, je sens que Dieu ne se soucie pas assez de moi, autrement il m’aurait laissé contrôler ma vie et vivre la tête haute. »

Chacun donc a le droit de vivre dans la dignité. C’est un principe ancré dans les traités des droits de l’homme dont Israël est signataire. Ce dernier doit s’acquitter de bonne foi de ses obligations établies en vertu du droit international par de nombreux arguments, par la pratique de l’Etat, par la jurisprudence de la Cour Internationale de Justice, ainsi que par les Comités des Droits de l’Homme et les Comités relatifs aux Droits Économiques, Sociaux et Culturels. S’agissant tout particulièrement du Pacte International relatif aux Droits Économiques, Sociaux et Culturels (PIDESC), il a été affirmé qu’Israël n’est pas seulement lié par ses dispositions en tant que Puissance Occupante dans la Bande de Gaza.

En vertu du Droit International relatif aux droits de l’homme, l’Article 6 du PIDESC reconnaît le droit au travail comme droit fondamental. De plus, le Comité relatif aux Droits Économiques, Sociaux et Culturels confirme que chaque individu a le droit d’être en mesure de travailler, ce qui lui permet de vivre dignement. Aussi, l’Article 39 de la Quatrième Convention de Genève de 1949 prévoit le droit des civils à jouir de l’opportunité d’exercer leurs activités professionnelles soumises à des mesures de sécurité appliquées sur eux.

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08 janvier 2013 – PCHR Gaza – Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.pchrgaza.org/portal/en/i...
Traduction : Info-Palestine.eu - Niha


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