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5 janvier 2009 : Amal al-Samouni, ou l’histoire d’une famille décimée

mardi 7 février 2012 - 06h:24

PCHR Gaza

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« Je souffre constamment de maux de tête et de douleurs au niveau des yeux et des oreilles. Pendant toutes ces trois dernières années, j’ai eu souvent des saignements de nez et jusqu’à maintenant je ressens les éclats d’obus bouger à l’intérieur de mon cerveau. »

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Amal al-Samouni (11 ans) assise devant sa maison dans le quartier de Zeitoun

C’était la journée du 4 janvier 2009, vers 6h00, quand les forces israéliennes sont venues encercler la maison où s’était abritée Amal al-Samouni, âgée aujourd’hui de 11 ans, en compagnie de 18 autres personnes appartenant à la grande famille al-Samouni.

L’attaque a eu lieu dans le quartier Zeitoun, à l’Est de la ville de Gaza. Ce jour, les soldats israéliens avaient sommé le propriétaire de la maison de sortir les mains en l’air. Aussitôt la porte ouverte, les soldats israéliens ont tiré sur le père de Amal, Attia al-Samouni, 37 ans, le tuant par plusieurs balles dans la tête et la poitrine pour ensuite ouvrir le feu dans la maison. Le massacre ne faisait que commencer et outre le père, le petit frère de Amal, Ahmad qui n’avait que 4 ans venait de rendre l’âme, sans compter les blessés qui étaient au nombre de 4, dont deux enfants.

Dans les heures qui suivirent, les soldats ont donné l’ordre à plus de 100 membres de la même grande famille pour qu’ils se placent dans la maison de Wa’el Fares Hamdi al-Samouni, l’oncle de Amal. Le lendemain, soit le 5 janvier, les forces israéliennes ont directement ciblé la maison et son voisinage, tuant ainsi 21 personnes et blessant autant d’autres. Parmi les personnes présentes à l’intérieur, il y avait Amal qui a été touchée par des éclats d’obus dans le crâne et fut ensevelie sous les décombres, au milieu des blessés, des agonisants et des morts de sa famille.
Et c’est seulement dans la journée du 7 janvier que des ambulanciers, jusqu’ici empêchés d’entrer dans la zone, ont réussi à évacuer la petite à l’hôpital.

En résumé, en l’espace de quelques jours (du 4 au 7 janvier), 27 membres de la famille al-Samouni ont été tués (dont 11 enfants et femmes), et 35 autres blessés (dont Amal et son frère jumeau Abdallah).

Amal a certes survécu à ces quatre jours des plus horribles, mais ne se remettra jamais des blessures permanentes et du traumatisme hérités de la guerre. En évoquant le passé entaché par une attaque meurtrière qui l’avait ensevelie sous les décombres de la maison de son oncle trois jours durant, sans nourriture ni eau, Amal confie : « La scène où j’ai vu comment mon père et mon frère avaient été tués défile sans cesse devant mes yeux ». En fait, la rescapée des al-Samouni n’a pas besoin d’un vocabulaire riche pour exprimer ce qu’elle ressent. Elle avoue, tout simplement : « Avant, nous vivions tous ensemble et nous étions une famille heureuse. Aujourd’hui, plongée dans la tristesse, je ne ressens plus aucune joie ».

Et comme la guerre n’engendre que perte et désolation, Amal n’a pas seulement perdu son père, mais également la maison familiale que l’ennemi n’a pas épargnée. Elle raconte : « Nous avons, pendant une année, vécu dans le quartier Shaja’iya dans Gaza, chez mes grands-parents maternels. Ensuite, nous avons vécu dans un entrepôt où il y avait du sable à la place du sol ».

Elle poursuit : « Cela fait six mois que nous habitons à l’endroit qui abritait autrefois notre maison. L’espace actuel ne fait même pas la moitié de la superficie de notre ancienne demeure. Personnellement, je n’avais pas l’envie de retourner vivre ici à cause des souvenirs sombres que le quartier évoque. Ma famille non plus mais nous n’avions pas d’autres options ».

A l’instar de tous les al-Samouni, la petite famille de Amal reçoit actuellement l’aide de la part de parents vivant dans le même quartier. Toutefois, cette assistance est loin de subvenir aux besoins de la famille qui se bat continuellement pour s’en sortir financièrement. D’autre part, et bien que les conditions de vie de la famille de Amal se soient légèrement améliorées, la maison manque toujours d’équipements comme un réfrigérateur, une machine à laver et une armoire pour ranger les vêtements des enfants.

Il faut également souligner que de son vivant, le père de Amal était fermier et travaillait sur une parcelle de terrain louée où il cultivait des légumes qui assuraient le revenu de la famille.

Aujourd’hui, la vie reprend son cours et voilà que le quartier des al-Samouni reprend la reconstruction de son existence, et Amal aussi. Mais cette dernière se livre à un combat d’un autre type : ses blessures. En effet, des éclats d’obus enfoncés dans son crâne sont à l’origine de ses maux de tête insupportables. Elle décrit son état : « Je souffre constamment de maux de tête et de douleurs au niveau des yeux et des oreilles. Pendant toutes ces trois dernières années, j’ai eu souvent des saignements de nez et jusqu’à maintenant je ressens les éclats d’obus bouger à l’intérieur de mon cerveau ».

Elle ajoute : « Les médecins locaux qui ont diagnostiqué mon cas m’ont expliqué qu’il serait extrêmement dangereux de retirer ces pièces ». Malgré cela, Amal n’accepte toujours pas cette vérité et souhaite ardemment pouvoir voyager pour consulter un autre médecin. « Je voudrais en avoir le c ?ur net et consulter un autre médecin pour un autre avis. Je voudrais frapper à toutes les portes qui me permettront peut-être d’en finir avec mon problème et ma douleur. Vous savez, d’autres enfants voyagent parfois pour le plaisir, mais mon cas est sérieux : je n’aspire pas à voyager pour m’amuser mais pour solliciter un traitement médical », explique-t-elle.

Il faut dire que ces douleurs incessantes ne bouleversent pas seulement le jeune corps de Amal, mais affectent aussi profondément son humeur, sa relation avec ses frères et s ?urs ainsi que son rendement à l’école. Elle avoue : « Quand j’ai trop mal je deviens nerveuse et irritée ». Sa mère Zeinat (38 ans) abonde dans ce sens et dit : « La douleur la met facilement en colère et elle s’abat sur ses frères et s ?urs et les frappe. Je l’ai récemment conduite à un hôpital pour essayer de voir comment l’aider. Le médecin lui avait prescrit un sédatif (Tramal), mais je ne peux pas la laisser prendre le médicament comme ça ».
En parlant de ses notes à l’école, Amal s’émeut mais reconnait : « Quand je suis triste, je pars chez ma tante pour voir mes cousins, ou alors me mets à préparer mes livres pour l’école. Avant la guerre, j’étais excellente à l’école, mais maintenant, mes notes ne sont plus ce qu’elles étaient ».

L’enseignant a notifié à la maman de Amal que cette dernière n’arrive pas à se concentrer en classe, c’est pourquoi elle a échoué dans deux matières au courant de ce semestre. Peinée, la fillette explique que cela est dû aux douleurs qui s’emparent de ses yeux lorsqu’elle fixe le tableau.

Toutefois, Amal ne se laisse pas décourager par ses ennuis scolaires et semble savoir quel type d’études elle voudrait poursuivre. La petite avoue : « Quand je serai grande, je voudrais devenir pédiatre pour aider les gens blessés et les soigner ».

En date du 8 mai 2009, le PCHR a soumis une plainte pénale auprès des autorités israéliennes au nom de la famille al-Samouni. A ce jour, seule une réponse interlocutoire attestant de la réception de la plainte a été émise. Aucune autre réponse n’a été donnée en dépit des nombreuses demandes formulées.

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Traduction : Info-Palestine.net - Niha


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