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Le Hamas après l’accord de la Mecque

mardi 20 mars 2007 - 08h:30

Kh. Amayreh - Palestine Times

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Est-ce que l’accord national de réconciliation signée entre le Fatah et le Hamas à la Mecque le jeudi 8 mars 2007, signifie une transformation des orientations politiques du Hamas ? Le Hamas va-t-il devenir plus pragmatique, et qu’est-ce que cela peut signifier concrètement ? Le Hamas est-il en voie de reconnaître Israël de facto et non de jure ?

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Manifestations d’étudiants appartenant au mouvement Hamas - Jénine, le 19 mars 2007 - Photo : AP/Mohammed Ballas

Le Hamas a nié lui-même tout changement significatif dans sa « pensée stratégique » vis-à-vis d’Israel, qui découlerait de l’accord de la Mecque. Les porte-parole du mouvement, particulièrement à Gaza, se sont empressés de réaffirmer le refus du Hamas de reconnaître Israel, affirmant que la question ne s’est jamais posée pendant les discussions à la Mecque. Récemment le porte-parole du Hamas à Gaza, Ismail Radwan, a déclaré : « Nous n’avons pas reconnu, nous ne reconnaissons pas et nous ne reconnaî-trons pas Israel parce que c’est un Etat qui est né du vol, de la dépossession et de l’usurpation des terres palestiniennes et de leurs droits ». Rawan a ajouté que les suggestions et les « insinuations » des médias au sujet d’un soi-disant « changement d’esprit » ou « changement de coeur » de la part du Hamas sont une « distorsion de la réalité. »

Pourtant le Hamas revient de loin sur sa rigidité idéologique qui s’exprimait dans sa charte de 1988 et que des analystes du Hamas tel qu’Azzam Tamimi, directeur l’institut de la pensée islamique à Londres juge comme anachronique et non approprié dans sa grande partie. Il est vrai que l’accord de la Mecque lui-même ne mentionne explicitement ni la « reconnaissance d’Israel, » ni ne stipule la fin de la résis-tance armée contre l’occupation israélienne. Ajoutez à cela que l’accord semble don-ner au Hamas « une légitimité arabe » grâce à l’ouverture du portail saoudien qui est le plus grand et probablement le plus sûr de toutes les portails arabes.

Cependant, il serait faux d’affirmer que le Hamas a remporté ces gains politiques sans faire de concessions. En effet, le fait que le Hamas a donné son accord pour « respecter et honorer » les accords précédents entre Israel et l’organisation de li-bération de la Palestine (OLP)et accepter les déclarations du sommet arabe à Beyrouth en 2002, représente une certaine évolution dans sa phraséologie politique. Selon le politologue palestinien Hani Al Masri, cela prouve que le Hamas est en train de chan-ger même s’il le fait « lentement et à contre-c ?ur ».

« Je ne pense pas que le Hamas est en train de prendre furtivement de la distance par rapport à ses constantes idéologiques de base et je ne suis pas sûr qu’il le devrait mais il est suffisamment clair pour dire que la politique vue à partir du gouverne-ment n’est pas la même que celle qui est vue de l’opposition. »

Masri reconnaît que l’accord de la Mecque peut être considéré par la suite comme un « un actif » plutôt qu’ « un passif pour le Hamas » parce que les palestiniens veu-lent « arrêter le bain de sang et prévenir à tout prix toute perspective de guerre civile. »

Le politologue de Nablus pense que le Hamas pourrait perdre un peu de sa popularité et de son soutien, notamment au sein de ses militants les plus idéologues et cela à court terme seulement. Ce « recul » serait de courte durée parce que la population se rendra compte par la suite que l’absence de la paix est dûe plus à l’intransigeance israélienne qu’à une soi-disante rigidité du Hamas, a-t-il ajouté.

Cela ne veut pas dire que le Hamas serait disposé à l’avenir et à un certain niveau, de donner à Israel une reconnaissance claire, explicite et sans condition. En effet, il y a une conviction chez le Hamas et la plupart des musulmans religieux que la re-connaissance d’Israel serait « haram » : sur le plan religieux, ce serait inadmissi-ble puisque l’intégralité de la Palestine est considérée comme un domaine islamique du Waqf.

Cependant, il est maintenant très clair depuis des d’années, et particulièrement de-puis la deuxième Intifada d’Al-Aqsa en 2000, que les chefs du Hamas les plus intran-sigeants sur le plan religieux, ne seraient pas en mesure de paralyser la pensée po-litique du Hamas et sa flexibilité en matière de tactique politique.

C’est dans ce cadre qu’il faut comprendre les déclarations récentes du chef politique du Hamas, Khalid Meshaal. Il a déclaré que le « Hamas reconnaîtra Israel comme une réalité géopolitique » et que le Hamas « serait disposé à coexister dans la paix avec Israel si ce dernier accepte de se retirer de tous les territoires occupés, y compris Jérusalem Est et qu’il permette le retour et l’indemnisation des réfugiés palesti-niens. » Cette déclaration , qui est répétée de temps en temps par des chefs du Ha-mas, est très proche de la position du Fatah. En effet, aucun chef du Fatah ne s’est jusqu’ici écarté des constantes auxquelles s’est accroché l’ancien Président Arafat jusqu’à son dernier souffle.

Au total, on peut conclure avec certitude que le Fatah et le Hamas sont en train de se rapprocher l’un de l’autre en matière de pensée politique, le Hamas devient moins idéologique et plus politique et le Fatah devient plus radical dans sa détermination pour réaffirmer les constantes palestiniennes bien connues. Le Hamas n’abandonne pas vraiment ses rêves idéologiques mais il découvre que ce n’est pas le moment de les mettre en avant mais qu’au contraire, il faut les garder en tant que cartes politi-ques dans les négociations à venir.

Bien qu’il est trop tôt pour parler de « Fatahi-zation du Hamas » ou « Hamasization du Fatah, » on peut noter que le Fatah et le Ha-mas réalisent qu’ils doivent changer et s’adapter afin de sauvegarder les intérêts primordiaux de la nation palestinienne tout comme leurs propres intérêts. Le Fatah s’est rendu compte que pour avoir le soutien et l’appui constant des palestiniens, il doit insister sur une fin complète et totale de l’occupation israélienne des terri-toires palestiniens depuis 1967, ainsi qu’une résolution juste de la situation criti-que des réfugiés palestiniens conformément à la résolution 149 des Nations Unies. De même, le Hamas s’est rendu compte qu’il est futile de demander aux palestiniens d’at-tendre jusqu’à ce qu’un nouveau Salahaddin apparaisse.

En attendant, quelques chefs du Hamas choisissent une nouvelle phraséologie en ce qui concerne la reconnaissance d’Israel, qui ne puisse pas leur aliéner la communauté in-ternationale ou la provoquer. Cela peut prendre la forme d’une volonté prononcée de la part du Hamas de reconnaître Israel de facto et non de jure, de lui reconnaître une légitimité « politique » mais non une « légitimité morale. »

La semaine dernière, alors les chefs du Hamas et du Fatah se réunissaient à la Mec-que, un fonctionnaire de haut rang du Hamas a dit à un journaliste : « nous recon-naissons l’existence d’Israel, c’est une réalité ; nous serions aveugles si nous di-sions qu’il n’existe pas. Mais je ne pense pas qu’Israel a le droit d’exister parce qu’il a été fondé sur le vol et le nettoyage ethnique. » Cette déclaration est sus-ceptible de marquer et d’identifier la position du Hamas dans quelques semaines ou quelques mois à venir, pourvu qu’elle puisse prouver à la communauté internationale que c’est Israel et non le Hamas, qui est l’obstacle principal à la paix au Moyen-Orient

10 mars 2007 - Palestinien Times
Traduit de l’anglais par D. Hachilif


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