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Un Norvégien suspecté d’avoir conçu des projets précis de violence contre les « traîtres », les musulmans

mardi 26 juillet 2011 - 04h:24

Ali Abunimah - E.I

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Anders Behring Breivik se voyait comme un guerrier saint et un croisé engagé dans une guerre contre une « alliance marxiste-islamiste » qu’il craignait de voir prendre le pouvoir en Europe si elle n’était pas arrêtée. Il espérait par ses actions exhorter des «  milliers » à marcher sur ses traces. Il se décrivait lui-même comme un « martyr » et un « combattant de la résistance ».

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"J’ai entendu votre appel et grâce à vous, j’ai pu faire mon devoir comme beaucoup d’autres continueront à le faire."




Pour lui, les membres du Parti travailliste de Norvège étaient des « traîtres » en raison de leur prétendu soutien « au multiculturalisme et à l’islamisation ». Behring préconisait des attaques «  terroristes » contre les mosquées, en particulier pendant les fêtes religieuses musulmanes.

Ceci est tiré d’un manuscrit de 1500 pages qu’a rédigé Breivik lui-même. Le journaliste de la chaîne de télévision publique norvégienne NRK a parlé de ce manuscrit et indiqué que Breivik avait reconnu l’avoir écrit et diffusé (Voir la traduction Google de l’information NRK).

Le manuscrit se compose de centaines de pages d’analyses politiques et d’idéologie, et de tout un chapitre, comme un journal intime, où il élabore une préparation méticuleuse pour les attaques d’hier. Breivik y cite aussi abondamment le politicien néerlandais d’extrême droite et antimusulman Geert Wilders.

Breivik a signé le manuscrit avec des termes montrant qu’il se voyait lui-même comme un croisé :

Andrew Berwick, Commandeur des chevaliers justiciers
Chevalier des Templiers d’Europe
Chevalier des Templiers de Norvège

Breivik est un fervent partisan d’Israël, et plus particulièrement des nationalistes d’extrême droite tel que le ministre israélien des Affaires étrangères, Avigdor Lieberman, et de son parti Israel Beytenou (Israël notre maison). Au premier abord toutefois, rien n’indique que son attaque n’ait été d’une manière ou d’une autre explicitement motivée par de telles opinions, mais il est clair qu’il considère Israël engagé dans la même « guerre » que celle dans laquelle il se voit lui-même comme un acteur.

J’ai téléchargé une copie de ce manuscrit à partir d’un lien publié sur Twitter par un journaliste norvégien. Pour autant, j’ai décidé de ne pas afficher cette copie parce que le manuscrit, en plus des écrits politiques de Breivik, contient des instructions détaillées sur la façon dont Breivik a pu récupérer des armes et des bombes artisanales. Il apparaît aussi dans le manuscrit que Breivik avait planifié son attaque depuis plusieurs années, notamment en se servant de couvertures élaborées, comme par exemple son poste dans une entreprise agricole.

En voici cependant quelques extraits qui pourraient éclairer sur les opinions et motivations de Breivik :

«  Martyr » et « combattant de la résistance »

Dans un chapitre où il parle de lui, Breivik se présente, professionnellement, comme :

« investisseur, directeur, fondateur-gérant de plusieurs entreprises, responsable en gestion de petites entreprises (dont le développement organisationnel), analyste politique, auteur, analyste/opérateur en bourse. Je ne suis pas sûr que combattant de la résistance (Commandeur des chevaliers justiciers) et martyr comptent comme une profession). »

Breivik croyait à l’existence d’une « guerre civile » en Europe et que des attaques spectaculaires étaient nécessaires.

Breivik considérait l’Europe engagée dans une longue « guerre civile » contre ses ennemis, une guerre qui pourrait durer des décennies et conduirait à un « coup d’État » grâce auquel un régime nationaliste européen prendrait le pouvoir. Durant cette guerre civile, pensait-il, il faut :

« Attendre le bon moment pour frapper ou créer une opportunité. Ceci se fera en organisant des incidents (assassinats ou attaques terroristes contre les mosquées durant les cérémonies, etc.) qui déclencheront des émeutes massives chez les musulmans. Si les émeutes sont suffisamment violentes, elles pourront servir d’occasion idéale pour le coup d’État. »

Breivik apparemment se voit comme un martyr potentiel dans un vaste « mouvement de résistance » européen :

« Je sais que des dizaines de milliers de frères et s ?urs dans toute l’Europe mènent le bon combat jour après jour. En combattant l’alliance culturelle marxiste-multiculturaliste, jour après jour. Beaucoup ont tout sacrifié déjà ; beaucoup sont incarcérés et certains se sont même sacrifiés, sont des martyrs. Les médias n’ont jamais parlé de leurs actes courageux et nobles et la grande majorité d’entre nous sont inconnus de la plupart des gens. Les régimes multiculturalistes actuels de l’Europe occidentale font tout ce qui est en leur pouvoir pour étouffer nos actions. Nous faire taire est leur arme de prédilection. Ils tentent systématiquement et délibérément d’imposer le blackout de sorte que le moins de gens possibles sachent qu’une guerre civile est en cours. Ils le font pour empêcher tout recrutement. Comme l’histoire l’a montré à maintes reprises, la chance tournera en notre faveur quand les gens s’y attendront le moins. Je salue chaque frère et s ?ur qui agissent, jour après jour ! Vous êtres les véritables héros de la révolution conservatrice ! Vous exhortez un nombre toujours plus grand d’Européens à marcher sur nos traces. S’il n’y avait eu les actions courageuses et désintéressées de ces héros européens, moi et d’autres comme moi n’aurions pas été encouragés. J’ai entendu votre appel et grâce à vous, j’ai pu faire mon devoir comme beaucoup d’autres continueront à le faire. J’espère pouvoir être capable de participer et d’encourager les autres. Nous subirons de nombreux échecs et nous connaîtrons bien pire avant que cela ne s’améliore. Cependant, n’oubliez jamais que des milliers de frères et s ?urs font tout ce qui est en leur pouvoir pour assurer notre succès, jour après jour. Nous réussirons finalement car le multiculturalisme est une idéologie autodestructrice.

Aux Parti travailliste, ce sont des «  traîtres » comme les nazis.

Dans une note datée de l’ « automne 2008 », Breivik écrit qu’il a participé à une soirée d’anniversaire à Oslo :

« J’ai remarqué qu’une majorité de ces gens étaient des sympathisants du Parti travailliste. J’ai supposé qu’ils n’avaient pas vraiment le choix car ils étaient tous en train de monter dans la hiérarchie du secteur public. Une pensée m’est venue. Les juges durant la Deuxième Guerre mondiale qui avaient adhéré au national-socialisme ou avaient eu le moindre lien avec la SS (références évidentes au régime nazi d’Allemagne ou à son régime fantoche norvégien de l’époque) avaient été poursuivis et emprisonnés. Est-il par conséquent juste que les juges de haut rang qui ont des liens avec le Parti travailliste et d’autres partis qui soutiennent le multiculturalisme (et donc l’islamisation) ne soient pas considérés comme des traîtres de catégorie B ou C ? Ils portent à l’évidence une responsabilité énorme et doivent être considérés comme des traîtres à leur peuple... »

Après de telles chimères, il ajoute :

« Si seulement ils avaient eu la moindre idée que l’un de leurs invités était un Chevalier justicier d’une organisation rattachée au mouvement de la résistance norvégienne et européenne, ils m’auraient jeté dehors aussitôt à coup sûr. Il est tout à fait compréhensible que leurs carrières seraient finies s’ils avaient quelque relation que ce soit avec de telles organisations ou individus. »

Breivik espérait en « inspirer des milliers » avec son attaque.

Au début de son journal pour la journée du 11 juin (période où il a testé intensivement les explosifs), Breivik écrit :

« J’ai prié pour la première fois et très longtemps aujourd’hui. J’ai expliqué à Dieu qu’à moins qu’il ne veuille l’alliance marxiste-islamiste et la prise de pouvoir certaine de l’Europe pour anéantir totalement la chrétienté européenne dans les cent prochaines années, Il devait assurer la domination des guerriers qui se battent pour préserver la chrétienté européenne. Il devait m’assurer le succès de ma mission en tant que telle ; aider à inspirer des milliers d’autres conservateurs nationalistes révolutionnaires ; et les anticommunistes et anti-islamistes de tout le monde européen. »

L’expérimentation de sa bombe

« Le lundi 13 juin, Jour J - 43 : J’ai préparé un dispositif d’expérimentation aujourd’hui et je me suis rendu dans un endroit très isolé. La bombe à tester est composée d’un élément principal DDNP 3 g et d’un secondaire, PA 30 g. Si cet essai échoue, j’abandonnerai l’opération A et m’orienterai vers l’opération B non spectaculaire.

« J’ai allumé la mèche, me suis mis hors de portée et j’ai attendu. Ce fut probablement les dix secondes les plus longues de mon existence...

« BOOM ! L’explosion est un succès !!! Je me suis rapidement éloigné pour éviter d’attirer une attention indésirable des gens du voisinage. J’ai dû revenir quelques heures plus tard pour étudier le cratère de l’explosion, pour savoir si les deux composants avaient explosé. »

La nécessité de frapper déjà

Breivik voit comme une nécessité de s’en prendre aux musulmans et à ceux qui sont perçus comme leurs alliés, pendant que les musulmans représentent encore une minorité. Et il l’explique, en prenant le Liban comme exemple :

« Historiquement, bien que les gens s’y soient trouvés en grande détresse et confrontés au chaos et aux effusions de sang, beaucoup ont continué de s’accrocher à l’espoir de paix grâce à l’apaisement (30 % des hommes, 70 % des femmes). Ils refusaient simplement de participer à des expulsions et à toute autre solution pragmatique-rationnelle et efficace, quelque chose qui était simplement contre leur nature (après des décennies d’endoctrinement par des idées pacifistes).

« Le Liban chrétien est un bon exemple. Au lieu de frapper alors qu’ils étaient encore majoritaires, ils ont attendu que les musulmans soient en majorité. Les nombreuses organisations chrétiennes ont saboté toute approche rationnelle (de la guerre) et ont voulu à la place plus d’apaisement. Cela s’est poursuivi jusqu’à la guerre civile, qui a finalement éclaté.

« Il était impensable pour ces gens de lancer les appels radicaux indispensables (de prendre des décisions rationnelles). Nous illustrerons cela à travers la question suivante :

« Si vous sauvez 1000 individus en en sacrifiant 100, devez-vous aider indirectement à tuer ces cent-là ? »





* Ali Abunimah est l’auteur de One Country, A Bold Proposal to End the Israeli-Palestinian Impasse. Il a contribué à The Goldstone Report : The Legacy of the Landmark Investigation of the Gaza Conflict. Il est le cofondateur de la publication en ligne The Electronic Intifada et consultant politique auprès de Al-Shabaka, The Palestinian Policy Network.

Du même auteur :

- Alice Walker : la Flottille de la liberté pour Gaza et le combat pour la justice
- « Réconciliation » de façade en Palestine
- Reconnaître la Palestine ?
- Une autre guerre contre Gaza ?
- Vers un « moment Moubarak » en Palestine
- La révolution continue après la chute de Moubarak
- Le soulèvement en Égypte et ses implications pour la cause palestinienne
- Le massacre de Gaza et la lutte pour la justice

23 juillet 2011 - The Electronic Intifada - Photo : Reuters/Xinhua - Traduction : JPP


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